Pourquoi est-ce ce que l’on fait soit-même a plus de valeur à nos yeux que ce que l’on achète dans le commerce ?

Pourquoi, l’objet qu’un ami m’a offert m’est plus cher que le même objet que je me serais acheté tout seul ? Si nous étions vraiment utilitaristes, nous devrions nous en foutre et revendre sur PriceMinister nos cadeaux de Noël si nous pensions pouvoir en tirer une valeur supérieure.
L’homme recherche sans doute à maximiser son utilité, mais sa notion de l’utilité dépasse de loin celle de l’homo economicus. Lors d’un article précédent, j’essayai de savoir ce qui au delà des motivations de l’Homme Economique pouvait motiver les actions humaines :
Il en ressortait que des motivations pas seulement matérialistes guidaient les actions humaines mais que des utilités sociales, ou purement intellectuelles pouvaient être des sources primaires de décisions. La recherche d’un sens supérieur est un besoin presque aussi vital que la nourriture.
Les humains n’ont pas attendu de « satisfaire leur besoins primaires » avant de dessiner des fresques dans des grottes ou de s’inventer des mythes, des Dieux et des héros. Le superflu est le premier des besoins comme dit Flaubert. Tant mieux !
Il faut considérer que l’on crée véritablement de la valeur lorsque l’on « fabrique » du sens social, de nouvelles valeurs symboliques, morales, une histoire où des nouveaux défis liés au produit. Il faut considérer que deux produits identiques en terme de fonctionnalité puissent valoir des choses différentes selon la façons dont ils ont été produits, distribués et employés.
Quitte à produire, je souhaite que le processus me permettre d’apprendre plutôt que d’aliéner, qu’il me permette de rencontrer des gens, et de développer avec eux de bonnes relations, que le fruit de mon travail soit un moyen d’expression, un moyen d’être d’indépendant, et que je sois convaincu de son utilité pour ceux qui l’achèteront.
Quitte à consommer, je voudrais que cet acte me procure, en plus d’un bien-être matériel, une utilité sociale, symbolique et peut-être même spirituelle. Je voudrais savoir qu’il me lie à l’humanité et à la nature, ou qu’il me garantisse une forme d’autonomie plus grande et non une plus grande dépendance.
Ces arbitrages, bien sûr qu’on les fait tous, avec notre dosage personnel. Ils sont indispensables à la compréhension de l’économie mais nulle part ils ne sont pris en compte dans les calculs du PIB ou des courbes d’utilité de l’homme économique. L’économie n’est pas seulement utilitaire, elle est une activité sociale, culturelle et spirituelle.
Si l’on se fait de l’économie l’idée qu’elle est l’activité qui vise à augmenter l’utilité au sens large, et donc plus ou moins le bonheur des gens, il faudra bien qu’elle prenne en compte la totalité des besoins humains, avec leurs contradictions et leurs subjectivités.
Ne serait-il pas temps de reconsidérer la valeur des choses et d’inclure dans cette valeur, non pas seulement une vague évaluation de son utilité pratique en bout de chaine, mais la prise en compte de l’ensemble des formes de valeur qui s’agrègent aux choses depuis leur conception jusqu’à leur destruction ?
Excellent comme point de vue
Et bien merci bien Alex !
Connaissez-vous la critique radicale de la valeur ?
http://www.palimpsao.fr ou le travail du philosophe Anselm Jappe pour importer la wertkritik allemande en France ?
En fait la valeur dans les sociétés capitalistes comme la nôtre est le temps de travail humain socialement nécessaire, une dépense de muscle, de cerveau, d’énergie indifféremment de l’objet fabriqué : c’est ce que l’on appelle le travail abstrait.
Le travail abstrait est le principe de synthèse social, le fétiche de nos sociétés capitalistes.
Ce temps de travail abstrait est contenu dans les marchandises.
Lorsque l’on achète un objet dans le commerce, il a souvent été fabriqué par des machines, qui elles réduisent à néant la temps de travail humain, et ne créent pas de valeur.
Du coup, la valeur de ces objets décroit drastiquement.
Les machines, par principe industriel vont déposséder les travailleurs de leur savoir-faire pour les réduire en tâches, les découper et les intégrer.
L’industrie va frelater pour faire des gains de productivité, et dégrader le produit tout en aliénant les travailleurs et les utilisateur.
C’est pourquoi, à mon sens, on préfèrera toujours ce que l’on fait soi-même à un produit sérialisé industriel. Indépendamment du fait que le produit est dégradé. C’est parce qu’il contient peu de travail humain, le fétiche social.
Je ne connaissais pas ces théories. Très intéressant ! Merci.
Mon lien sur la critique radicale de la valeur ne fonctionne pas :
C’était en fait :
http://www.palim-psao.fr/
Désolé