Mutinerie, libres ensemble - espace de coworking à Paris » Event http://www.mutinerie.org Libres ensemble Tue, 21 Oct 2014 19:38:05 +0000 fr-FR hourly 1 Les lieux de travail qui ont changé l’histoire 4/ Les coopératives ouvrières http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-4-les-cooperatives-ouvrieres/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-4-les-cooperatives-ouvrieres http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-4-les-cooperatives-ouvrieres/#comments Sun, 11 Aug 2013 14:14:43 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=26858 Voici la suite, et la fin de ma série sur les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Ces derniers mois ont été particulièrement chargés à Mutinerie et, à ma grande frustration, je n’ai pas pu trouver le temps de continuer à écrire. Faisons donc un petit bilan. Nous nous étions penchés sur des lieux,...

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Voici la suite, et la fin de ma série sur les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Ces derniers mois ont été particulièrement chargés à Mutinerie et, à ma grande frustration, je n’ai pas pu trouver le temps de continuer à écrire. Faisons donc un petit bilan. Nous nous étions penchés sur des lieux, des époques et des initiatives complètement différentes, en commençant par les monastères à l’époque médiévale, les Kibboutz puis les ateliers d’artistes au XIXème siècle. Cette fois-ci encore, on change d’ambiance pour étudier les coopératives ouvrières et leurs influences sur les façons de travailler depuis l’époque où elles sont nées jusqu’à nos jours.

Pourquoi et comment sont-ils nés ?

A l’heure ou les premières coopératives apparaissent, l’Europe, qui s’industrialise rapidement, sort d’un monde où l’essentiel des travailleurs sont des agriculteurs ou des artisans indépendants. A cette époque, ces indépendants s’organisent en communautés (de villages et corporations de métiers). Chacun travaille avec ses propres outils et ses propres techniques. Les outils les plus coûteux sont souvent partagés entre les différents travailleurs d’une même communauté.

Quant aux autres métiers, ils sont la plupart du temps structurés au sein de corporations, jurandes ou compagnonnage  aux règles extrêmement codifiées qui prennent en charge les artisans de leur apprentissage, jusqu’à leur maitrise, qui régulent les prix, formalisent les bonnes pratiques et arbitrent en interne les tensions. Le salariat est souvent un mode d’apprentissage transitoire plutôt qu’un statut définitif. Malgré leurs défauts (fermeture excessive, organisations patriarcales, freins à l’innovation et aux nouveaux entrants, peu de sens de l’intérêt du plus grand nombre, manque de transparence…) les corporations protègent relativement bien le travailleur et les intérêts des corps de métier qu’elles exercent.

Mais sous la pression croissante du capitalisme industriel, le travail commence à subir une transformation radicale, dans ses objectifs et ses méthodes.

Les corporations, et de manière générale, toutes les formes de solidarités professionnelles, sont devenues un obstacle à l’ascension des premiers empires industriels.

Elles gênent la libre détermination des prix, elle entravent les lois de la concurrence, de la circulation des hommes et des marchandises et résistent aux méthodes d’organisations des grandes entreprises.

Au sein des entreprises industrielles, les travailleurs se retrouvent progressivement seuls face à ceux qui possèdent les outils. Le statut salarié se généralise et devient un mode de travail durable. Il s’agit d’un moment inédit dans l’histoire des hommes.

Si l’on considère en même temps l’exode rural qui accompagne ce mouvement et qui déracine les gens de leurs attaches traditionnelles, on mesure un peu mieux l’étendue de la perte que subissent des millions de travailleurs en Europe. Perte de leurs outils, de leurs réseaux, de leurs cultures et finalement de leurs libertés.

C’est la Révolution Française qui supprime les corporations car elle les considère comme des institutions au services d’intérêts particuliers qu’elle prétend combattre. La fameuse loi Le Chapelier de 1791 les rend illégales. Le message est clair :

Il n’y a plus de corporation dans l’État ; il n’y a plus que l’intérêt particulier de chaque individu et l’intérêt général

Une bien belle parole qui se traduit concrètement par des réalisations un peu moins flamboyantes. Car comme le disait Antoine, dans l’un de ses articles, l’intérêt général est essentiellement le résultat d’un rapport de force. C’est celui qui est capable, dans un groupe donné, de récompenser ou de punir, qui orientera les intérêts particuliers vers son intérêt, pas si général que cela…

Les révolutionnaires croyaient-ils à l’efficacité de cette démarche ou était-ce une manoeuvre pour ouvrir définitivement la voie à l’économie capitaliste ? Le sujet fait encore l’objet de toutes les spéculations (voir cet excellent article sur la question). Mais au delà des polémiques, qui auront bien du mal à trouver une issue claire tant la Révolution Française fut traversée de courants contradictoires et chaotiques, ce que l’on voit déjà naitre chez les réformateurs de l’époque, c’est une opposition sur la manière de concevoir la méthode qui pourra permettre de faire émerger un intérêt général et améliorer le sort de milliers de travailleurs exploités.

D’un coté, certains considèrent que chaque citoyen est seul, égal devant la Loi, seule forme d’expression valable de l’intérêt général qui ne doit surtout pas être biaisée par d’autres groupements d’intérêts particuliers. Dans ce mode de pensée, toute forme d’association ayant un objectif social est considérée comme un corps intermédiaire s’interposant de manière illégitime entre l’Etat et le citoyen. Mais dans ce cas, si l’on poursuit cette logique, pourquoi l’entreprise industrielle, qui est une forme d’association défendant des intérêts particuliers, trouve-elle grâce aux yeux des gouvernements tandis que les corporations, associations et coopératives demeurent interdites ?

Pour d’autres, l’Etat ne peut, ou ne doit être en lui-même le seul garant de l’intérêt général. Soit parce qu’il est impossible de garantir qu’il soit en mesure d’oeuvrer seul, efficacement à l’intérêt général, soit parce que l’on considère que les travailleurs eux-même sont les mieux placés pour comprendre les problématiques de leur métier et d’envisager les meilleures façons d’y répondre. Ou soit simplement, parce que l’on considère qu’il est naturel à l’homme de se rassembler, d’échanger et de s’unir…

Principes et fonctionnement des coopératives

Evidemment, ces transformations radicales des rapports sociaux ne sont pas passées inaperçues. Elles ont suscité des idées, des initiatives alternatives ainsi que des réactions à la fois idéologiques et concrètes. Sur le plan théorique, Les apports de théoriciens et de praticiens, popularisant les idées de communauté et de démocratie, ont contribué à faire émerger le mouvement de la coopération de production. Parmi les plus célèbres : Saint-Simon, Charles Fourier (fondateur du Phalanstère), Jean-Baptiste Godin (créateur du Familistère), Louis Blanc, Philippe BuchezJoseph Proudhon ou encore Robert Owen, considéré comme l’un des pères de la pensée coopérative.

Seuls devant la Loi, seuls devant l’employeur, seuls face aux marchés, seuls dans des villes nouvelles composées de gens coupés de leurs communautés, le besoin et les bénéfices de l’union de ces nouveaux travailleurs devient criant.

Des initiatives apparaissent de toute part mais sont souvent crées de façon clandestine car toujours interdites par la Loi le Chapelier ou diverses lois instaurant un « délit de coalition » en Europe. Certaines naissent de l’esprit d’entrepreneurs soucieux du bien-être des ouvriers et engendrent des projets comme le Phalanstère ou le Familistère. D’autres émergent à partir des besoins de travailleurs sur le terrain et se répandent rapidement. Le cas le plus fameux est celui des Equitables Pionniers en 1844 en Angleterre. Il s’agit au départ d’un groupement de quelques tisserands qui se rassemblent pour pouvoir acheter, dans un magasin coopératif, des produits bon marché. D’une quarantaine de souscripteurs en 1844, la Société en compte plus de 10 000 en 1880. Les Équitables Pionniers sont imités dans toute l’Angleterre : les coopératives de consommation comptent plus d’un million d’adhérents au début du XXème siècle.

En France, la Bellevilloise est un bon exemple de ce à quoi pouvait ressembler une coopérative parisienne à la fin du XIXème siècle et au début du XXème. Avec jusqu’à 15 000 sociétaires en 1929, elle a été l’une des sociétés les plus représentatives et les plus célèbres du mouvement coopératif français. Autour de la distribution de produits de consommation courante, La Bellevilloise a progressivement développé des oeuvres sociales, éducatives et culturelles étonnamment étendues. Les enfants pouvaient participer à son patronage et bénéficier de séjours en colonies de vacances. Les veuves ou les grévistes y trouvaient le soutien nécessaire pour faire face aux difficultés immédiates. On pouvait y apprendre l’espéranto ou la dactylographie, pratiquer un sport ou chanter, s’initier au théâtre ou assister à un concert donné par de grands interprètes, emprunter des livres à la bibliothèque ou venir danser à l’occasion de nombreuses fêtes, assister à la projection de films et de conférences, consulter un médecin …. La Bellevilloise a largement contribué a recréer du lien et des solidarités dans tout l’est parisien. Bien qu’elle ait aujourd’hui changé d’activité, la Bellevilloise a accueilli l’année dernière la conférence européenne du coworking. Le clin d’oeil historique est assez amusant…

la bellevilloise

En 1895, l’Alliance Coopérative Internationale publie une déclaration sur l’identité coopérative qui énonce sept principes d’une coopérative. Cette définition reste aujourd’hui encore la référence centrale pour les coopératives :

  1. Adhésion volontaire et ouverte à tous. Les coopératives sont des organisations fondées sur le volontariat et ouvertes à toutes les personnes aptes à utiliser leurs services et déterminées à prendre leurs responsabilités en tant que membres, et ce sans discrimination fondée sur le sexe, l’origine sociale, la race, l’allégeance politique ou la religion.
  2. Pouvoir démocratique exercé par les membres. Les coopératives sont des organisations démocratiques dirigées par leurs membres qui participent activement à l’établissement des politiques et à la prise de décisions. Les hommes et les femmes élus comme représentants des membres sont responsables devant eux. Dans les coopératives de premier niveau, les membres ont des droits de vote égaux en vertu de la règle « un membre, une voix » : les coopératives d’autres niveaux sont aussi organisées de manière démocratique.
  3. Participation économique des membres. Les membres contribuent de manière équitable au capital de leurs coopératives et en ont le contrôle. Une partie au moins de ce capital est habituellement la propriété commune de la coopérative. Les membres ne bénéficient habituellement que d’une rémunération limitée du capital souscrit comme condition de leur adhésion. Les membres affectent les excédents à tout ou partie des objectifs suivants : le développement de leur coopérative, éventuellement par la dotation de réserves dont une partie au moins est impartageable, des ristournes aux membres en proportion de leurs transactions avec la coopérative et le soutien d’autres activités approuvées par les membres.
  4. Autonomie et indépendance. Les coopératives sont des organisations autonomes d’entraide, gérées par leurs membres. La conclusion d’accords avec d’autres organisations, y compris des gouvernements, ou la recherche de fonds à partir de sources extérieures, doit se faire dans des conditions qui préservent le pouvoir démocratique des membres et maintiennent l’indépendance de leur coopérative.
  5. Éducation, formation et information. Les coopératives fournissent à leurs membres, leurs dirigeants élus, leurs gestionnaires et leurs employés, l’éducation et la formation requises pour pouvoir contribuer effectivement au développement de leur coopérative. Elles informent le grand public, en particulier les jeunes et les dirigeants d’opinion, sur la nature et les avantages de la coopération.
  6. Coopération entre les coopératives. Pour apporter un meilleur service à leurs membres et renforcer le mouvement coopératif, les coopératives œuvrent ensemble au sein de structures locales, nationales, régionales et internationales.
  7. Engagement envers la communauté. Les coopératives contribuent au développement durable de leur communauté dans le cadre d’orientations approuvées par leurs membres.

Selon l’Alliance Coopérative Internationale, un milliard de personnes sont membres de coopératives dans plus de 90 pays. Un million de coopératives dans le monde emploierait 100 millions de personnes en 2012 ! Les coopératives sont aujourd’hui totalement intégrées dans le système économique et ont largement fait preuve de leur efficacité comme de leur pérennité…

Enseignements pour le coworking

D’abord, il est étonnant de constater la proximité incroyable entre les 7 principes coopératifs et les principes du coworking. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si de nombreux espaces fonctionnent sur le modèle de coopérative (SCOP).

  • Créer du lien dans un environnement individualiste : Les associations de travailleurs et de consommateurs ont émergé dans un contexte de destruction des solidarités collectives avec la volonté explicite de tisser des liens nouveaux. Ces anciennes solidarités rurales et corporatistes pouvaient être jugées trop oppressantes, fermées et mal adaptées aux logiques industrielles, mais leurs désagrégations ont plongé les plus faibles dans un état d’oppression pire encore. Les mouvements coopératifs sont parvenues à enrayer et parfois à faire reculer l’individualisme (dans un contexte souvent hostile), ce qui s’est traduit par une amélioration de la vie de milliers de personnes.

    Notre époque récente souffre elle aussi cruellement de ce manque de liens nécessaires, le coworking peut contribuer à renouer des liens nouveaux entre des indépendants et travailleurs qui actuellement restent trop souvent isolés.

  • L’intérêt général et les intérêts particuliers : Les questions que soulèvent la loi le Chapelier et l’idée de supprimer les « corps intermédiaires » sont centrales pour comprendre l’utilité, et la nécessité de communautés fortes et représentées dans une société. D’une part l’Etat n’est pas une garantie de l’intérêt général et d’autre part, ce n’est pas parce que l’on représente, à titre privé un groupement de personnes ayant des sensibilités et des intérêts communs que l’on ne peut pas oeuvrer à l’intérêt général. Le fait d’être élu ne transforme pas un homme en un serviteur zélé du bien commun, et la vraie valeur de la démocratie ne réside pas dans le fait que chacun puisse élire ses dirigeants mais dans l’existence d’une agora permettant à chaque élément composant une société de s’exprimer de manière pacifique et honnête.

    Une société dans laquelle chacun est seul dans son rapport aux institutions et aux grandes structures abouti à l’instauration de la loi du plus fort et non pas à l’intérêt général.

    Cela me fait dire que les espaces de coworking ont tout intérêt à défendre, non seulement leurs communautés locales, mais également a accentuer leur niveau d’échange et de collaboration entre espaces pour faire réellement émerger les décisions allant dans le sens de l’intérêt général. 

  •  l’échec relatif des initiatives top-down basées sur les communautés d’intérêts

On l’avait vu lors de précédents articles, cela se confirme encore; les initiatives « top-down » tel que le Phalanstère, le Familistère, New Harmony (dans l’Indiana), Ralahine (en Irlande) et Tytherly (en Angleterre) ont toutes connues un succès limité au point de vue opérationnel. Ils n’ont pas souvent réussi à devenir des centres vivants, pérènnes et féconds de production et de justice sociale.

Josiah Warren, un anarchiste qui fut l’un des premiers membres de la New Harmony Society, affirma que la communauté était vouée à sa perte en raison de l’absence de souveraineté individuelle et de propriété privée. Il déclara au sujet de la communauté :
« Les différences en termes d’opinions, de préférences et d’objectifs semblèrent s’accroître proportionnellement à l’exigence de conformité. Deux années furent gaspillées de cette manière ; après quoi, je crois que trois personnes tout au plus avaient encore le moindre espoir de réussite. La plupart des expérimentateurs s’en vinrent, abandonnant tout espoir de réforme, et on sentit le conservatisme se confirmer. Nous avions essayé toutes les formes d’organisation et de gouvernement imaginables. Nous avions un monde en miniature. Nous avions joué la scène de la Révolution française encore et encore avec pour résultat nos cœurs désespérés au lieu des cadavres. Il apparut que c’était la propre loi de la diversité inhérente à la nature qui nous avait vaincus. Nos ‘union d’intérêts’ était en guerre directe avec l’individualité des personnes et des circonstances, et avec l’instinct d’auto-préservation… et à l’évidence, il apparut qu’en proportion de la rencontre de personnes ou d’intérêts, les concessions et les compromis s’avéraient indispensables. »
Ce que dit Josiah Warren mérite une sage médiation pour tous ceux qui créent ou souhaitent créer des communautés d’intérêt sans communautés d’idéaux.

Les communautés d’idéaux sont plus solides car, si les intérêts changent souvent, les idéaux perdurent.

New Harmony

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Les lieux de travail qui ont changé l’histoire. 2/Le Kibboutz http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz/#comments Tue, 09 Apr 2013 08:17:07 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=26454 Mutinerie continue ses plongées spatio-temporelles dans les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Après le monastère à l’époque médievale, nous nous attaquons au Kibboutz, ces villages collectivistes émergés en Palestine à partir du début du XXème siècle. Pour cet article, j’ai fait appel à Léonard Déage, un ami non seulement féru d’histoire mais ayant également...

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Mutinerie continue ses plongées spatio-temporelles dans les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Après le monastère à l’époque médievale, nous nous attaquons au Kibboutz, ces villages collectivistes émergés en Palestine à partir du début du XXème siècle.

Pour cet article, j’ai fait appel à Léonard Déage, un ami non seulement féru d’histoire mais ayant également testé la vie dans un Kibboutz pendant 6 mois à la fin de ses études. Il sait donc de quoi il en retourne sur ces questions. Rappelons ce qui nous intéresse dans ses flashbacks historiques; comprendre comment des espaces de travail et de vie innovants sont nés, se sont organisés et ont su modifier le cours de l’histoire. Dans ces expériences du passé résident sans doute de nombreux enseignements pour ceux qui tentent actuellement de changer nos façons de vivre et de travailler.

Contexte de la fondation du premier kibboutz : Degania

L’Empire russe de la fin du XIXe siècle connaît de graves troubles politiques, et les émeutiers finissent souvent par se retourner, notamment lors de l’assassinat de l’Empereur Alexandre II, en 1881, contre les très nombreuses communautés juives installées sur les actuels Ukraine, Moldavie, Biélorussie, Pologne et pays baltes.
Parallèlement, les idées sionistes mettent en effervescence les milieux intellectuels laïcs de la Diaspora occidentale : Théodore Herzl publie son Der Judenstaat (L’Etat juif) et réunit le premier Congrès sioniste à Bâle, en 1897.
Ces idées suscitent un enthousiasme particulièrement fort au sein des communautés d’Europe orientale, qui subissent régulièrement de violentes persécutions, et qui restent soumises à des lois discriminatoires.

On assiste alors à plusieurs vagues d’immigration successives vers la Palestine (de l’ordre de 50 000 personnes entre 1881 et 1914), alors sous domination ottomane. De petites  équipes se forment et s’installent sur des terres préalablement acquises par le Fonds National Juif (KKL), et dont l’exploitation leur est concédée.
Pour ces jeunes pionniers, qui le plus souvent ne savent rien de l’agriculture, il s’agit maintenant de survivre, de défricher, drainer les marécages, dépierrer les champs, planter des arbres… Beaucoup se découragent et vont plutôt tenter leur chance en Europe occidentale, aux Etats-Unis ou en Amérique du Sud.

Si la volonté de ces pionniers est bien de créer un Juif nouveau, vivant du travail de la terre et de ses mains (métiers qui avaient longtemps été interdits au Juifs, dans les ghettos d’Europe), loin de toute exploitation de l’homme par l’homme, et si les vétérans du Bund et autres partis socialistes ouvriers juifs sont nombreux, tous ne sont pourtant pas des socialistes convaincus.

En l’absence d’un courant politique dominant et dogmatique, et devant l’extrême diversité de cultures, de langues et de mode de vie des immigrants juifs, de nombreuses expériences d’organisation coexisteront au début. Cela donnera aux Kibboutz une démarche expérimentale indéniable.

La rudesse du travail, dans des champs restés en jachère pendant des siècles, l’isolement géographique, et parfois la nécessité de faire face aux menaces des tribus bédouines environnantes rendent en fait le travail et la vie en communauté indispensables à la réalisation de cet idéal. Les fermes qui ne fonctionnent pas sur des principes égalitaires, avec propriété collective des moyens de production, périclitent ou explosent.

C’est dans ce contexte qu’en 1909 est fondé Degania, au bord du Lac de Tibériade, en Galilée. C’est dans ce kibboutz que de nombreux pionniers seront formés, pour essaimer ensuite en fondant plus loin de nouveaux kibboutzim, dans l’idée de pouvoir revendiquer l’occupation d’un maximum de territoire avant la proclamation prochaine de l’Etat d’Israël et le partage des terres qui s’ensuivrait.

Fonctionnement d’un kibboutz type

Le principe de collectivisme ne s’arrête pas à la propriété et à la coopérativité, mais s’applique aussi à la vie sociale (les repas sont pris en commun dans une grande salle, etc.), à l’éducation (les enfants sont élevés par groupes d’âge, et ne voient leurs parents que quelques heures par jour). Les décisions concernant le kibboutz sont soumises à un régime de démocratie participative directe.

L’administration est réduite au strict minimum, ce qui est rendu possible par le fait qu’en moyenne un kibboutz compte moins de 450 membres, mais pas non plus sans rapport avec un fond de culture anarchiste. Les postes administratifs sont tournants.
Après les dépenses de fonctionnement et les dotations aux investissements, les revenus sont partagés équitablement entre les membres, selon la taille des familles, et les services sont gratuits (école, dispensaire, buanderie, installations sportives, dans une certaine mesure la restauration collective, …). Ces revenus sont d’ailleurs essentiellement versés sous la forme d’un budget (« droit à dépenser dans l’enceinte du kibboutz »), et seulement en partie sous forme de salaire en monnaie courante (pour les achats personnels en dehors du kibboutz).

Cependant, contrairement à ce qu’on pourrait penser, les kibboutzim ne fonctionnent pas en autarcie (ils ne peuvent pas produire tout ce qu’ils consomment), mais ils sont même liés à l’Etat de manière relativement importante. Ils exploitent des terres qui lui sont concédées par l’Etat, et ont touché (jusqu’à l’arrivée du premier gouvernement de droite, en 1977) d’importantes subventions. De plus, les kibboutzim ont historiquement fourni un important contingent à l’administration publique et à l’armée.

Après la proclamation d’indépendance et la première guerre israélo-arabe, en 1948, les kibboutzim contribuent aussi largement à l’absorption du flux d’exilés juifs issus des pays de l’Orient arabe, puis après l’indépendance des pays du Maghreb dans les années 60, puis après l’ouverture partielle de l’Union soviétique dans les années 70, et depuis son effondrement en 90.

Le kibboutz constitue alors une première étape – une sorte de sas de décompression – pour les nouveaux immigrants, au cours de laquelle sont dispensés, dans des écoles dédiées, des cours d’hébreu et des conseils pratiques (formalités, ouverture d’un compte bancaire, enregistrement à la Sécurité Sociale, …).

A noter que, à de rares exceptions près – une vingtaine de kibboutzim religieux sur 271 -, les kibboutzim sont laïques (voire un peu bouffe-rabbin…), et ne retiennent par exemple des fêtes juives traditionnelles que leur origine agricole ou leur sens national.

piocheuses

Héritage

Après une période de crise dans les années 70, certains kibboutzim ont mené de profondes réformes, de l’instauration progressive de salaires différenciés à la privatisation pure et simple, en passant par la constitution en moshav (autre structure, plus proche de la coopérative classique).
En tendance, on a assisté à un recentrage de la vie privée sur la cellule familiale ; c’est ainsi que les enfants sont aujourd’hui majoritairement élevés par leurs parents, que les repas ne sont plus pris systématiquement en commun, et qu’une plus grande partie du budget est versée en monnaie.
De plus, conséquence d’un niveau globalement élevé d’éducation, le kibboutz s’est ouvert sur l’extérieur : en embauchant de la main-d’œuvre non-membre pour les travaux les moins qualifiés, et en permettant aux membres de travailler à l’extérieur (à condition de reverser la plus grande partie de leur salaire à la collectivité).

Aujourd’hui, les kibboutzniks ne représentent plus qu’1,8% de la population israélienne. Pourtant les 271 kibboutzim contribuent à 40% de la production agricole, 10% de la production industrielle et 6% du PIB d’Israël.

Mais surtout le kibboutz a donné au pays une étonnante proportion de ses hauts cadres militaires et politiques, et parmi les personnalités les plus engagées et les plus militantes socialement.
Jusque dans les années 80, il a constitué pour la société israélienne un modèle vers lequel tendre, et s’il ne jouit plus du même prestige qu’autrefois, il a durablement façonné la production, l’idéologie et la culture israéliennes.
Depuis les années 2000, le kibboutz connaît un regain de popularité et sa population croît de nouveau. Certains se sont en effet spécialisés dans des productions à haute valeur ajoutée : haute technologie, agriculture de pointe, industrie de l’armement, … Ils intègrent des bureaux de recherche et développement renommés dans le monde entier. D’autres encore se sont tournés vers les services : le tourisme essentiellement.

Le kibboutz reste une exception historique, et le mouvement communautaire le plus grand du monde.

Et le coworking dans tout ça ?

Quels enseignements le coworking peut-il tirer de l’expérience des kibboutz ?

  • Exodus

Le contexte dans lequel émergent les Kibboutz est unique au monde. La création d’Israël est un exemple rare d’une création nationale essentiellement « bottom-up » ; un mouvement spontané de la base vers le sommet. Elle part d’une base de personnes qui, en dépit d’énormes différences culturelles, partagent un sentiment d’appartenance à une communauté mais ne peuvent espérer vivre selon leur aspirations au sein des pays dans lesquels ils résident.

Le kibboutz est conçu comme un refuge pour les gens persécutés, un moyen d’échapper à l’oppression et à l’exploitation.

Les premiers Kibboutzim emergent bien avant qu’Israël soit reconnu comme un Etat, il ont précédés celui-ci et lui ont permis de prendre forme. Le coworking est également un mouvement bottom-up, né d’abord d’un mouvement spontané et rejoint par une réflexion plus globale. Il comporte également cette dimension de refuge, de lieu de vie et de travail vivant hors des règles actuelles jugées dégradantes, inadaptées, injuste ou simplement obsolètes.

  • Pas de communauté efficace sans idéal

Les Kibboutzim, comme les monastères du reste montrent qu’à partir du moment où des groupes humains sont unis par un idéal commun et une volonté réelle de vivre ensemble, il est possible de construire de grandes choses malgré une diversité culturelle colossale. C’est également quelque chose que le mouvement du coworking doit garder en tête. La diversité de profils et de compétences dans nos espaces ne peut être un véritable atout que si nous sommes capables de proposer et de maintenir un idéal commun partagé par tous.

Le modèle du kibboutz enseigne que lorsque l’on rassemble des gens partageant un idéal et qu’on leur donne les moyens de production, on peut potentiellement refaire société, au point de créer un Etat …

  • L’équilibre entre l’idéal et le réel

Le modèle d’organisation des kibboutzim se dessine au fur et à mesure des différentes expérimentations. Ce qui a émergé c’est fait davantage par pragmatisme que par conviction politique. Ce qui ne veut pas dire que les pionniers n’avaient pas d’idées politiques, mais qu’ils n’avaient pas d’idée préconçue de la forme que celles-ci devaient prendre.

La fondation d’Israël est très rapidement (et violemment) confronté à la dure réalité, et un modèle comme celui du Kibboutz n’aurait pu continuer à exister s’il n’était pas capable de s’y frotter. Il a été façonné par le réel, sans perdre son idéal.

Tandis qu’en pleine Union Soviétique, on transforma l’idéal socialiste en objectifs concrets et en plans quinquennaux, les kibboutz s’employèrent à garder et maintenir cet idéal tout en faisant face au réalités quotidiennes de manière assez pragmatique. J’y vois là un enseignement important sur la manière de conjuguer l’idéal, la vision avec le fameux « mur de la réalité » qui terrifie, et qui bien souvent fini par aplatir bon nombre de nobles esprits …

  •  Les risques

Enfin, on voit aussi dans l’histoire des kibboutzim, les germes des dangers qui peuvent guetter ce modèle d’organisation. L’histoire des Kibboutzim, comme celle des monastères et celle des espaces de coworking comporte ses erreurs, ses tensions et ses divisions.

Pour les kibboutzim, le risque de la confusion entre l’action des communautés et celle des gouvernements est évident.

L’histoire de la fondation d’Israël et celle des kibboutzim ne cesse de s’entremêler au risque de provoquer une perte d’indépendance réelle pour les kibboutzim et une potentielle instrumentalisation de ces derniers au profit d’une politique d’Etat. Les kibboutzim ont clairement servi de verrou pour l’appropriation et la consolidation des territoires fraichement acquis et ont bénéficié d’aides et de subventions diverses.

 On se retrouve bientôt pour découvrir un lieu de travail ayant changé l’histoire; les ateliers d’artiste au XIXème siècle

Si vous souhaitez contacter Léonard, le féliciter, le conspuer ou lui poser des questions, c’est ici

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Samedi Jeux de société http://www.mutinerie.org/samedi-jeux-de-societe/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=samedi-jeux-de-societe http://www.mutinerie.org/samedi-jeux-de-societe/#comments Mon, 08 Apr 2013 14:23:19 +0000 Masha Kosobokova http://www.mutinerie.org/?p=26447 Rejoignez-nous pour une après-midi de jeux de société. Apportez vos jeux, du rhum et/ou votre bonne humeur. Cette petite séance sera l’occasion de discuter du Weekend Games que nous sommes en train de fomenter.  Pour + d’info Rendez-vous le 20 avril à 15h00 à Mutinerie : 29 rue de Meaux – 75019. N’hésitez pas à inviter...

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Rejoignez-nous pour une après-midi de jeux de société. Apportez vos jeux, du rhum et/ou votre bonne humeur. Cette petite séance sera l’occasion de discuter du Weekend Games que nous sommes en train de fomenter.  Pour + d’info

Rendez-vous le 20 avril à 15h00 à Mutinerie : 29 rue de Meaux – 75019. N’hésitez pas à inviter vos amis!

 

 

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Deux mois en Mutinerie : quelques enseignements http://www.mutinerie.org/deux-mois-en-mutinerie/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=deux-mois-en-mutinerie http://www.mutinerie.org/deux-mois-en-mutinerie/#comments Tue, 15 May 2012 14:26:02 +0000 Antoine van den Broek http://www.mutinerie.org/?p=4464 Des enseignements et des ajustements… Mutinerie mute et mutera.

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Déjà deux mois que Mutinerie s’est installée au 29 rue de Meaux, l’occasion de faire un rapide point. Nous vous livrons en vrac quelques observations qui serviront peut être à d’autres espaces de coworking.

D’abord quelques chiffres. Après deux mois d’activité, Mutinerie près de 75 membres qui se répartissent comme suit :

- 5 Résidents

- 10 Illimités

- 17 Flex (10j/mois)

- 26 Light (4j/mois)

- 17 Basic (1j/mois)

Le choix de la flexibilité

Depuis le début nous avions souhaité offrir un grande flexibilité aux coworkers. Cela signifie à la fois pouvoir choisir le nombre de jours de présence (et ne payer que pour ces journées) et avoir la liberté de mettre fin à son abonnement le plus simplement possible (pré-avis d’une semaine). Ce modèle de bureaux ultra flexibles n’est généralement pas ce que les gens cherchent en premier lieu (formule non conventionnelle) et il n’était pas forcément évident à défendre. Ce modèle est d’autant plus délicat lorsqu’on se fixe comme premier objectif la cohésion du groupe et la construction d’une communauté de valeurs et de confiance. Il s’agissait donc d’éviter l’écueil du « je viens, je paie, je me casse », genre de mercenariat froid que l’on retrouve traditionnellement dans les centres d’affaires.

On en revient toujours au même point : comment être effectivement libres et ensemble ?

C’est, entre autres pour cette raison que nous avons souhaité conserver la logique d’abonnement mensuel. Comme nous l’expliquions il y a un mois lors de notre premier bilan, cet engagement envers la communauté mais aussi envers sa conscience nous semble mieux correspondre à l’esprit de Mutinerie qu’un système de crédit qui s’apparenterait plus à un fonctionnement de cybercafé ou de centre d’affaires.

Deux mois après l’ouverture, force est de constater que nous ne nous étions pas trompés sur l’intérêt des travailleurs d’aujourd’hui pour la flexibilité comme en témoigne le succès des forfaits Flex (10j/mois) et Light (4j/mois). Le travail n’est plus un lieu mais ce que l’on fait et tout le monde n’a pas nécessairement besoin d’être présent tout les jours au même endroit. Ce qui compte avant tout c’est l’accès que l’on peut avoir à certaines ressources et les gens de qui on a envie de s’entourer.

Ce constat peut surprendre. En effet, on remarque souvent dans les espaces de coworking une tendance à la résidentialisation des membres. Autrement dit, les postes résidents sont de plus en plus nombreux à mesure que l’espace de coworking vieillit. Cela semble plutôt intuitif dans la mesure où les coworkers ont tendance à s’enraciner et où les gérants d’espaces encouragent cette résidentialisation pour des raisons pratiques aisément compréhensibles (besoin de pérenniser les paiements d’abonnements en favorisant les forfaits plus engageants, gestion opérationnelle plus simple que pour les abonnement flexibles…).

Notre expérience nous confirme néanmoins qu’un modèle flexible a toute sa place dans les paysage du coworking et que celui ci est totalement compatible avec la logique de communauté inhérente à tous vrai projet de coworking.

La communauté s’organise de fait autour de plusieurs cercles de proximité qui correspondent souvent à la fréquence de présence des différents coworkers. Ce sentiment de communauté est renforcé par l’outil de travail collaboratif que nous utilisons (Yammer) qui permet à chacun de rester connecté au groupe et à la vie du lieu même lorsqu’il ou elle n’est pas présent sur place.

war room Mutinerie Coworking Paris

L’organisation des espaces de réunions

Cette réflexion sur la flexibilité et le constat d’une certaine faiblesse de notre offre résident (bureaux moins lumineux que les bureaux nomades, décor moins poussé à ce stade) nous ont amené à repenser l’organisation de l’espace.

L’espace résident du fond va donc devenir une salle de réunion. Nous aurons ainsi trois salles ouvertes à la réservation, indépendantes du reste de l’espace : la war-room (la salle de réunion actuelle), l’agora (dans la cave) et le salon privé (la nouvelle salle de réunion). Ces trois espaces répondent à trois besoins différents

- La War-Room (la salle de réunion actuelle) : qui deviendra une salle de brainstorming ultra dynamique destiné aux réunions courtes (entre 30mns et 2h) et intenses privilégiant la position debout. Les murs deviendront de vastes tableaux où vous pourrez jeter vos idées et échafauder vos plans. La war-room pourra accueillir une douzaine de personnes. Le but c’est que vous en sortiez la tête farcie, complètement vidé après avoir tout donné.

- L’Agora (la cave) : qui prend forme et qui s’organise comme un petit forum. Elle est idéale pour les débats et assemblée jusqu’à 20 personnes. C’est en quelque sorte l’assemblée mutine. L’ambiance sous-sol et le décor singulier devraient désinhiber les plus réservés d’entre vous.

- Le Salon (la nouvelle salle de réunion) aura vocation à accueillir des travailleurs habituellement dispersés qui voudraient se retrouver tranquillement dans un même lieu afin de travailler ensemble ponctuellement. On y trouvera un petit salon confortable et une grande table de réunion. Cette pièce permettra de s’isoler du reste de l’espace et de mener des sessions de travail collectifs pendant une demi-journée ou une journée. Elle pourra accueillir une douzaine de personnes.

*Ces trois salles sont équipées pour des projections.

Dans le cadre de ce grand ménage de printemps et pour rendre notre offre plus cohérente, nous avons aussi revu les prix des forfaits résidents et illimités. Le forfait résident passe de 390€ à 340€ et le forfait illimité de 290€ à 250€ (prix HT mensuels).

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Les valeurs du Coworking 2/5 : Communauté http://www.mutinerie.org/les-valeurs-du-coworking-25-communaute/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-valeurs-du-coworking-25-communaute http://www.mutinerie.org/les-valeurs-du-coworking-25-communaute/#comments Wed, 05 Oct 2011 06:46:23 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=3388 La valeur « communauté » doit pouvoir être répercutée concrètement à tous les niveaux. Le lieu doit être pensé comme un simple outil aménagé pour faciliter ces interactions et rendre possible le développement de relations de long terme entre les coworkers.

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Mutinerie continue l’exploration des valeurs centrales du coworking. Après nous être penchés sur la Durabilité, nous abordons la valeur Communauté. Cette série d’article s’inspire du travail d’Alex Hillman, co-fondateur de l’Indy Hall de philadelphie.

Community first

Lorsque Alex Hillman dit que la priorité dans un espace de coworking c’est la communauté, il faut prendre cela dans les deux sens; c’est une priorité en terme d’importance stratégique et une priorité chronologique.

Un espace de coworking n’est que l’expression physique d’une communauté de valeur, de travail, de vie…

C’est pourquoi, lorsque l’on cherche à fonder un espace de coworking, il faut d’abord commencer par réunir une communauté pour ensuite lui proposer un espace approprié. Votre travail de créateur sera de procurer à cette communauté un espace qui lui ressemble et qui lui permettra de vivre et de croitre selon ses attentes, ses besoins et ses valeurs. Il serait inapproprié de débuter l’activité de coworking dans le sens inverse; d’abord ouvrir un lieu et attendre que les gens s’y rendent. Le risque c’est de ne pas correctement répondre aux attentes des membres et de transformer son espace en un centre d’affaire flexible où les conditions d’échanges, de partage et d’interactions ne sont pas remplies…

Un patrimoine commun

Lors d’un article précédent sur la vie des communautés, nous avions vu que celles-ci naissaient lors de l’apparition d’un patrimoine commun.

Ce patrimoine commun signifie le partage de certaines valeurs, de rituels, de moments ou d’expériences…

Pour ceux qui lancent un espace, cela implique qu’une partie de leur travail sera d’identifier et de rassembler ces gens qui partagent (ou qui souhaitent partager) quelque chose. Il est donc nécessaire de sélectionner les membres, non pas uniquement sur le niveau d’avancement de leur projet mais sur l’intention et la capacité des nouveaux venus à échanger sincèrement avec les autres.

Evidement, ce patrimoine commun, c’est aussi le lieu. C’est pourquoi il est indispensable que l’espace soit, lui aussi très facilement appropriable par les membres. Dans l’idéal, le lieu doit être modulable et adaptable  afin que les idées, les talents, les univers de chacun puissent s’y inscrire jusque dans les murs.

Une erreur commune serait de vouloir bien faire en créant un lieu trop figé, trop soigné et en quelque sorte trop « fini ». Mais dans ce genre d’endroit, pensé dans les moindres détails par quelqu’un d’autre, dans lequel vous ne pouvez imaginer modifier quoi que ce soit sans défigurer l’ensemble, ne trouvez-vous pas difficile de vous sentir parfaitement à l’aise ? Alors pourquoi ne pas laisser les membres apporter des éléments de déco, laisser les coworkers doués repeindre quelques pans de murs ou modifier l’agencement de l’espace ?

La communauté ne vous appartient pas

Si vous avez lu les lignes précédentes, vous comprendrez sans peine que la communauté ne vous appartient pas.

Vous pouvez posséder un lieu, pas la communauté ; vous en faites partie comme les autres coworkers.

Pour Alex Hillman, il n’est pas forcément nécessaire d’être un leader de la communauté mais il faut se préparer à en être un membre actif. Alex préfère largement venir à Indy Hall comme simple membre plutôt que comme propriétaire des lieux. Car on oublie trop souvent de dire que les propriétaires des lieux bénéficient eux aussi des mêmes avantages que leurs membres car ils en sont eux aussi.

Pas de communauté forte sans confiance

Si les relations entre les membres sont comme les tendons qui permettent à la communauté d’avoir de la cohérence, la confiance représente les muscles qui la rendent forte et saine

Alex Hillman

Pour que s’établisse cette confiance au sein du groupe, il faut commencer par faire soit-même confiance. Il faut aussi savoir faire confiance à l’auto-sélection. Pour provoquer cette auto-sélection positive, communiquez fortement vos valeurs, avec votre style, accordez une grande importance aux premiers membres; ce sont eux qui donneront le ton et qui attireront d’autres personnes dignes de confiance… et ne faites pas concessions sur le fond.

Consulter les autres articles de la série :

 

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http://www.mutinerie.org/les-valeurs-du-coworking-25-communaute/feed/ 1
Les valeurs du Coworking 1/5 : Durabilité http://www.mutinerie.org/les-valeurs-du-coworking-15-durabilite/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-valeurs-du-coworking-15-durabilite http://www.mutinerie.org/les-valeurs-du-coworking-15-durabilite/#comments Thu, 29 Sep 2011 12:23:53 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=3357 Les espaces de coworking doivent chercher à se construire sur des bases solides. Ils privilégient la recherche d’autonomie à travers un business model viable et les relations vraies aux rencontres précipitées…

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Au fur et à mesure des discussions et des débats qui animent la communauté du coworking à travers le monde, un certain consensus s’est peu à peu dessiné autour des valeurs spécifiques au coworking. Les réflexions ont été menées par des acteurs tels que Citizen SpaceIndy Hall, ainsi que par les membres de la communauté du Coworking Group.

Ces échanges ont abouti à la définition de valeurs centrales du coworking qui peuvent être résumées en 5 piliers :

L’objectif des billets qui suivent sera de détailler, de préciser ce que recouvrent ces valeurs, ce qu’elles signifient vraiment pour les acteurs du coworking et ce qu’elles impliquent à tous les niveaux de l’organisation et de la gestion de ces espaces collaboratifs.

Car il ne suffit pas d’affirmer des valeurs comme des déclarations de bonnes intentions ; celles-ci doivent être inscrites dans l’ADN du mouvement du coworking.

Je me suis inspiré d’une série d’articles très intéressants d’Alex Hillman que je vous remets ici :

1/ Durabilité

Super Green ?

Lorsque l’on parle de durabilité, de pérennité, on pense immédiatement aux effets écolos du coworking. Mutualiser les ressources et limiter les déplacements professionnels, c’est forcément écologique mais il me semble que là n’est pas le point central.  Plus exactement, l’aspect écologique semble tellement aller de soit qu’il ne peut pas véritablement être considéré comme une valeur en tant que telle. Etre un « acteur écologiquement responsable » aujourd’hui, c’est un peu comme dire qu’une entreprise place « l’efficacité » dans ses valeurs… C’est un bon objectif, mais pas une valeur pour elle-même.

L’indépendance est le meilleur gage de pérennité

A mon sens, être promoteur de la valeur pérennité, c’est avant tout s’assurer que ce que l’on fait doit pouvoir être fait aussi longtemps que nécessaire, c’est construire sur la durée. En d’autres termes, il s’agit de faire en sorte de ne pas dépendre de ressources extérieures pour se maintenir, grandir et prospérer.

Une communauté qui peut se nourrir elle-même est libre. Si elle n’y parvient pas, elle ne l’est pas. Tout simplement.

@JoelSalatin

Si l’espace de coworking n’est plus utile à ses membres, il s’éteindra ou évoluera naturellement et cela sera somme toute assez logique, mais une communauté qui est exposée au  risque de disparaître parce que son modèle dépend de facteurs externes n’est non seulement pas libre, mais elle n’est pas durable.

Lors de la création d’Indy Hall, Alex Hillman et Geoff DiMasi ont cherché à s’assurer de l’autonomie de l’espace. « Il faudra être en mesure de pouvoir couvrir nos charges et de se laisser une marge de croissance, grâce aux seules contributions des membres » se sont-ils dit.  « Ainsi ce sont les membres seuls qui auront en main leur destin et l’espace vivra tant qu’ils voudront qu’il vive ».

Relations Durables

Les relations qui naissent dans les espaces de coworking ont elles aussi vocation à être durables. A l’inverse des séances de Networking ou les speed dating entrepreneurials qui se terminent souvent par des discussions formatées et des distributions de cartes frénétiques, les relations entre coworkers se développent sur la durée, et se tissent au fur et à mesure,  sans obligations particulières.

Les espaces de coworking cherchent donc à se construire sur des bases solides. Ils privilégient la recherche d’autonomie à travers un business model viable et les relations vraies aux rencontres précipitées…

Je continuerai l’exploration des autres valeurs dans mes prochains billets. D’ici là, n’hésitez pas à réagir !

 

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Transformer une communauté en mouvement ; la méthode Harvey Milk http://www.mutinerie.org/transformer-une-communaute-en-mouvement-la-methode-harvey-milk/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=transformer-une-communaute-en-mouvement-la-methode-harvey-milk http://www.mutinerie.org/transformer-une-communaute-en-mouvement-la-methode-harvey-milk/#comments Tue, 12 Jul 2011 06:37:01 +0000 Antoine van den Broek http://www.mutinerie.org/?p=2301 Inspirer, motiver, organiser, mobiliser une communauté et la faire passer à l’action, voila des questions centrales pour les entrepreneurs d'aujourd'hui. Harvey Milk excellait dans cet art délicat, ça vaut le coup de comprendre comment il s'y prenait.

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Ce billet est une traduction de l’article d’Alex Hillman initialement publié sur DangerouslyAwsome.
Alors que le concept de communauté prend de plus en plus de place dans la vie sociale et le business, il m’a parut intéressant d’en proposer une traduction française :

My Name is Harvey Milk and I’m here to recruit you

Voilà son cri de guerre. Ce weekend, je me suis posé pour regarder Milk, un documentaire sur la vie d’Harvey Milk, premier homme politique américain ouvertement gay. Le travail d’Harvey Milk pour les droits des homosexuels est intéressant en soit. Je n’entrerai pas dans le détail mais je vous recommande chaudement ce film. Ce qui m’intéresse ici, c’est la stratégie qu’utilise Harvey Milk pour inspirer, motiver, organiser et mobiliser une communauté et la faire passer à l’action. Je suis convaincu que cette dynamique en quatre temps, avec itération, est une technique particulièrement puissante et qui mérite réflexion.

1 – Inspirez

La première action que va entreprendre Milk est modeste; il s’agit simplement de sortir de l’ombre.  Dans le contexte de l’époque, aller de l’avant sur le sujet de l’homosexualité était en soit une source d’inspiration. Lors de son parcours, il perdit de nombreuses élections, mais sa ténacité et son combat attiraient un nombre croissant de militants au fil des années. Tous n’étaient pas également impliqués dans le mouvement et n’avaient pas la même expérience. Anne Kronenberg, qui deviendra l’organisatrice en chef du mouvement, avait déjà à son actif plusieurs campagnes électorales alors que d’autres comme Cleve Jones n’en avaient pas. Harvey a pourtant su reconnaitre son potentiel et  savait quand et comment permettre à Cleve d’exprimer son talent. Milk ne faisait aucune discrimination;

Lorsque vous organisez une communauté, la première chose à faire, c’est de ne pas rester seul. Inspirez votre entourage et gagnez une masse critique. Puis identifier du sang neuf qui continuera à recruter et à répandre le message.

2 – Motivez

Dès lors que vous avez atteint une taille critique, que vous vous êtes entourés de partenaires actifs et passionnés, ne vous reposez pas sur vos lauriers. Osez, surprenez. Dans le film, on voit Harvey mener une manifestation de milliers de résidents gays du quartier de Castro à San Fransisco la nuit où le conté de Dade vota l’expulsion des enseignants homosexuels des écoles. Il a su canaliser l’énergie des manifestants au bord de l’émeute par son discours et son charisme. C’est bien cet évènement qui a permit à Milk de provoquer une réaction en chaîne et de convaincre les supporters potentiels de devenir des supporters effectifs du mouvement.

En tant qu’organisateur de communauté, votre deuxième étape est de montrer à votre groupe les moyens d’actions et de leur donner la possibilité de les mettre eux-même en oeuvre. Chaque membre doit pouvoir regarder ce que vous faites et se dire « je peux le faire également ». Et vous bien sûr, devez leur répondre « bien sûr que tu peux le faire ».

3-Organisez

C’est dans ce domaine qu’Harvey s’illustra tout particulièrement; lorsque ses choix devinrent tactiques, il su s’appuyer sur les relations qu’il avaient nouées. Milk maitrisait l’art de la délégation. Il connaissait ses meilleurs disciples et savait à quel moment et comment compter sur eux. Lorsque vous organisez quelque chose, pensez à décomposer vos objectifs et les tâches à accomplir en « petits morceaux », en sous-objectifs compréhensibles et atteignables, puis répartissez ces tâches parmi vos partisans.

En faisant en sorte que vos objectifs soient clairs et réalisables, vous créez des situations dans lesquelles vos membres ont une chance de réussir. Une fois qu’il auront connu le goût de la victoire, ils auront encore plus faim d’autres victoires et reviendront prêts et plus expérimentés pour retrouver d’autres combats.

« Mais s’ils échouent ? » Pas grave. Comme les tâches ont été fragmentées, il échoueront sans nuire au mouvement et en tireront des leçons. Mais le plus important est que d’autres apprendront également de cet échec.

En tant qu’organisateur de communautés, votre troisième étape est d’organiser, mais pas de micro-gérer. Sachez déléguer et récompenser le succès par de nouveaux objectifs plus ambitieux. Sachez aussi voir en l’échec le gain d’expérience. Il y a souvent plus à apprendre de l’échec que du succès.

4-Mobilisez

C’est beaucoup plus simple que ce que l’on croit, surtout si vous avez suivi les étapes précédentes.

Vous avez déjà un groupe de personne rassemblées autour d’une vision commune, vous avez des gens inspirés et inspirants. Vous avez su diviser vos objectifs de manière à créer des situations propices à la victoire (et peu sensibles à l’échec). Maintenant, vous pouvez y aller. Mobilisez c’est transformer vos plans en action. Choisissez une cible de référence et faites en sorte que chacun puisse s’y focaliser en même temps. Chacun doit regarder vers le même objectif et appuyer sur la gâchette au même instant.

En tant qu’organisateur de communauté, votre quatrième étape est de repérer votre cible, de la fixer et de tirer lorsque vous serez prêt.

5-Recommencer

Quand vous pensez avoir fini, ne vous arrêtez pas; c’est l’occasion de commencer un nouveau cycle. A chaque fois que vous recommencez un cycle, son impact sera toujours plus grand que le précédent. Vous avez avec vous plus de gens capables d’inspirer, de motiver, d’organiser et de mobiliser. Chaque action déployée entraine davantage d’actions que vous pourrez déployer. Les communautés grandissent jusqu’à un point de rupture et continuent de grandir sous d’autres formes. C’est ainsi qu’elles fonctionnent et c’est une bonne chose.

En tant qu’organisateur de communauté, votre dernière étape est de ne jamais avoir de dernière étape. Recommencez.

 

 

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Vies et morts des communautés http://www.mutinerie.org/vies-et-morts-des-communautes/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=vies-et-morts-des-communautes http://www.mutinerie.org/vies-et-morts-des-communautes/#comments Mon, 27 Jun 2011 11:20:04 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=3039 Qu’est-ce exactement qu'une communauté. Comment nait-elle, comment s’organise-t-elle et comment peut-elle disparaître ?

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Comment les espaces de coworking peuvent être à l’origine de nouvelles communautés ? Comment peuvent-ils leur permettre de se fédérer et de s’organiser plus efficacement ? Voilà des questions centrales pour les Mutins car – on ne le dira jamais assez – le succès d’un espace de coworking dépend avant tout de sa capacité à faire naitre, à rassembler et à faire croitre une communauté. Pour cela, il faut d’abord essayer de comprendre ce qu’est exactement une communauté. Comment elle nait, comment elle s’organise et comment elle peut disparaître…

Un patrimoine commun

la découverte de l’origine étymologique du mot communauté m’a mis en joie ; le mot vient du latin cum numus, c’est un groupe de personnes ; cum qui partagent quelque chose ; numus, un bien, une ressource ou au contraire une obligation, une dette… Ainsi, le partage serait à l’origine de la constitution des communautés… C’est beau ! Et cela rejoint une idée mutine avancée lors d’un article précédent ; l’échange, le don et le lien social.

Romulus et Rémus

Naissance des communautés

Mais quels peuvent être ces patrimoines communs ou ces dépendances à un même élément, capables de fonder de nouvelles communautés ?

Un territoire ou un lieu commun

D’abord, il peut s’agir d’un territoire ou d’un lieu fréquenté régulièrement par plusieurs individus. A force de s’y retrouver, des liens pourront se créer ce qui pourra donner naissance à une communauté de lieu. Les relations qui naissent sur les lieux de travail, dans les écoles ou les villages peuvent donner naissance à ce genre de communauté.

Des ressources partagées

La mise en commun des ressources est un facteur majeur de création de communautés. Que ce soit un puits où chacun vient s’abreuver, une usine ou une maison familiale, le fait de partager et de dépendre de certaines ressources favorise la création de lien social.

Une langue commune

La langue est aussi un patrimoine commun, partagé de manière indivisible par telle ou telle population. Par conséquent, elle permet d’être la base d’une communauté. La communauté des partisans de l’esperanto est un exemple de la fondation d’une communauté par la langue.

Une mémoire, une histoire commune

L’appartenance à un passé commun, réel, romancé ou fantasmé est un facteur d’unité et un moyen de rassembler les hommes. Dans l’antiquité, la création d’un passé mythique a joué un rôle important dans la constitution d’une identité grecque, juive ou romaine. Sous la IIIème république, les figures de héros nationaux tels que Vercingétorix ou Jeanne d’Arc ont été mises en avant pour renforcer l’unité nationale.

Des connaissances et des techniques partagées

Les cercles de penseurs, les communautés scientifiques, les corporations de métiers sont autant d’exemples de communautés constituées autour de savoirs ou de techniques partagées.

Des valeurs, centres d’intérêt ou idéaux communs

Enfin, certaines communautés sont constituées autour de valeurs, de centres d’intérêt ou d’idéaux communs. les communautés religieuses, les familles politiques ou encore les clubs de sport appartiennent à cette catégorie.

En pratique, les communautés s’imbriquent les unes dans les autres. Les communautés qui naissent au sein d’une entreprise par exemple, peuvent être à la fois communautés de lieu, de ressources, de connaissances, d’histoire et de valeurs. Les communautés les plus solides sont celles capables de réunir un maximum de patrimoine commun. Il existe toutefois un risque inhérent au fait de partager un trop grand patrimoine commun, celui de tomber dans une sorte de consanguinité culturelle, de se refermer, et de sombrer dans le communautarisme… Pour éviter cela, les communautés les plus complètes doivent veiller à rester ouvertes et réceptives à d’autres influences.

Comment peut naitre une communauté dans un espace de coworking ? En partageant le même lieu, les mêmes ressources, en mettant en commun leurs idées et leurs compétences, les coworkers multiplient les occasions de fonder de nouvelles communautés.

L’âge adulte

La communauté s’oppose à la société et à l’association en ce qu’elle est formée indépendamment de la volonté de ses membres et qu’ils ne décident pas de leur implication.

Une communauté n’est pas nécessairement un groupe opérationnel, elle peut exister d’elle-même, sans que ses membres en soient réellement conscients. Elle peut exister sans projet nettement formalisé ni leader établi.

Il arrive toutefois que la communauté finisse par prendre conscience d’elle-même et décide de s’organiser. C’est là, sans doute, le véritable acte de naissance d’une société. En me renseignant sur le sujet, je suis tombé sur Ferdinand Tönnies, sociologue et philosophe. Lisez plutôt : « Tönnies explique, à travers les notions de volonté organique (Wesenwille) et celle de volonté réfléchie (Kürwille), le passage de l’individu de la communauté (Gemeinschaft) vers la société (Gesellschaft). Pour lui, la volonté organique est à l’origine de la forme de vie sociale communautaire. Elle est une spécificité du comportement des individus vivant en communauté, caractérisée par l’attachement, l’affection qu’a l’individu, envers sa famille, son village, ceux qui y habitent et les pratiques coutumières et religieuses y existant. La forme sociale sociétale est, quant à elle, le produit de la volonté réfléchie, c’est-à-dire qu’elle est issue de la pensée humaine. »

Une société, c’est donc d’abord une communauté qui a pris conscience d’elle-même et qui a décidé de s’organiser.

Cette prise de conscience peut survenir de plusieurs manières :

  • La communauté entre en contact, (pacifiquement ou non) avec une force extérieure et réalise par là même qu’elle existe.
  • Un ou plusieurs leaders parviennent à faire prendre conscience de l’unité de la communauté et/ou à proposer un projet collectif.
  • De nouveaux outils, de nouvelles techniques ou de nouveaux moyens de communication font prendre conscience de l’existence de communautés jusqu’à lors dispersées.

Le Mahatmah Cette prise de conscience est sans doute en train de se réaliser sur Internet. Le développement de nouvelles fonctionnalités web permettant de rassembler et d’organiser des communautés diffuses (réseaux sociaux, P2P…). La découverte de la puissance de la culture numérique et de sa capacité à influer le cours des évènements (Wikileaks, Anonymous) et le sentiment d’agression perçu par les communautés numériques (répression numérique en Tunisie, Egypte, Iran, chine, lois Hadopi…) sont peut-être en train de transformer les communautés en ligne en sociétés en ligne.

Comment les espaces de coworking peuvent permettre de fédérer, de renforcer et d’organiser les communautés existantes ? Comment peuvent-il transformer les communautés en micro-sociétés ? Internet a vu naitre un nombre impressionnant de communautés qui n’avaient pas de lieux physiques pour se rassembler et s’organiser. Les espaces de coworking peuvent remédier à cela ; ils permettent aux micro-sociétés en puissance de se réunir, d’y organiser des évènements ou encore de s’y former pour être plus efficace dans leurs actions collectives.

La mort des communautés

Lorsqu’une communauté perd le patrimoine commun qui fait son unité, elle perd du même coup sa raison d’être.

Une communauté n’a plus lieu d’être si elle n’a plus rien à partager.

Je vois 3 causes de mortalité principales pour une communauté :

  • le patrimoine commun disparait : Suite à un changement technologique, culturel, politique ou idéologique, l’élément commun qui faisait l’unité de la communauté disparait. Ce patrimoine peut également disparaitre en cas de dispersion géographique d’une communauté ou en cas de disparition d’une ressource partagée. L’exode rural donne un bon exemple de la destruction de communautés. En quelques années, les communautés rurales unies autour d’un lieu (village), d’une ressource commune (la terre) d’un métier (agriculture), d’une mémoire commune voire d’une langue ou d’un patois local ont été délocalisées, dispersées et finalement assimilées. Elles ont laissé la place à de nouvelles communautés plus urbaines, plus industrielles…
  • le patrimoine commun est confisqué : Il peut arriver, lorsque la communauté a commencé à s’organiser, que le patrimoine commun soit confisqué par une ou plusieurs personnes éminentes qui auraient été tentées de confondre « gestion » du patrimoine commun avec « appropriation » du patrimoine… l’histoire fourmille d’illustrations : idées religieuses et valeurs morales confisquées par un clergé, hommes d’Etat véreux ayant tendance à confondre les caisses de l’Etat avec les leurs, historiens malhonnêtes réécrivant l’histoire… Or si le patrimoine autrefois partagé par tous est confisqué par quelques-uns, le bien commun devient bien privé et la communauté disparait.
  • la communauté n’a plus de raison d’être : Cette dernière cause de mortalité représente en quelque sorte la belle mort des communautés, celle qui survient lorsque la communauté a atteint une taille critique ou une maturité suffisante. La communauté perd alors son pouvoir fédérateur et sa vitalité, elle n’est plus un vecteur identitaire assez fort pour l’individu. Elle se scinde alors en plusieurs sous-communautés plus vivaces qui, partant d’une base commune, y ajoutent des éléments propres et créent une nouvelle dynamique.

En revanche, une société peut survivre à la communauté dont elle était issue. De la même manière qu’un récif de corail continue de garder sa structure longtemps après que ses micro-organismes soient morts, les structures sociales peuvent perdurer un temps mais elle perdent alors leur vitalité, deviennent rigides, cassantes et finissent par s’effriter progressivement…

Tableau récapitulatif :

communautés et sociétés

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Hippies et Geeks, Même Combat ? http://www.mutinerie.org/hippies-et-geeks-meme-combat/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=hippies-et-geeks-meme-combat http://www.mutinerie.org/hippies-et-geeks-meme-combat/#comments Tue, 31 May 2011 00:43:34 +0000 Antoine van den Broek http://www.mutinerie.org/?p=2820 Liberté, partage, communauté, rébellion, réalité augmentée… Hippies et Geeks, cousins issus de Germaine ?

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« In loyalty to their kind they cannot tolerate our minds ~ In loyalty to our kind we cannot tolerate their obstruction »

Jefferson Airplane Crown of Creation

Ce cri de guerre est plus que jamais d’actualité et pourrait figurer sur le fronton de Mutinerie, mais ne nous méprenons pas : un espace de coworking n’est pas une communauté hippie. La confusion est commune chez les profanes. Liberté, partage, communauté… ça nous rappelle quelque chose tout ça… et on voit comment ça a fini… Voici donc une petite mise au point.

Le rapport au progrès

Le mouvement hippie est largement dominé par une défiance vis-à vis-de la modernité et des avancées technologiques. Les nouvelles technologies sont surtout appréhendées comme une menace à notre bien-être.

Après les ravages de la seconde guerre mondiale, en pleine guerre du Vietnam, il est forcément difficile de louer un progrès technique qui sert surtout à tuer plus de gens plus facilement.

L’idéologie hippie dominante prône un retour à la nature, elle est emprunte d’une certaine nostalgie romantique. Comme chez Rousseau l’état sauvage est associé à une innocence heureuse. Le progrès en revanche, est dangereux. Nous sommes loin du geek overplugué insatiable de nouvelles découvertes technologiques. Le geek croit au progrès ; il y croit car il en bénéficie directement. Alors que la technologie était vue comme une arme à disposition des puissants, elle peut apparaitre aujourd’hui comme un instrument d’émancipation. Les révolutions arabes (dont nous ne connaissons pas encore les conséquences) ont pu avoir lieu en partie grâce à des objets technologiques très récents. De jeunes informaticiens y sont devenus des héros.

L’organisation de la communauté

Communauté ; un mot fortement associé à la culture hippie qui revient en force aujourd’hui. D’où quelques malentendus… Les communautés hippies se veulent être des sociétés idéales. Malheureusement, les expériences communautaires hippies ont souvent échouées sur le long terme car elles ne permettaient pas le renouvellement nécessaire du contrat social – et avec lui, c’est fatal, des membres constituant la communauté. Les communautés se sont souvent fossilisées autour d’idéaux trop éloignés de la réalité du terrain. Elle ont souffert d’une trop forte consanguinité.

Les désirs des humains évoluant sans cesse, la communauté doit être capable de s’adapter en permanence. Ex Fan des sixties, petite baby doll, sèche tes larmes. Exit la communauté idéale – bonjour la communauté optimale. Nous pouvons définir très simplement la communauté optimale comme celle qui articule au mieux liberté individuelle et intérêt commun.

La communauté optimale n’existe en fait qu’à un instant donné. Elle est constituée par des individus qui à un moment bien précis décident d’unir leurs efforts pour aller ensemble dans une direction commune selon un plan établi.

La communauté geek existe de fait. Alors que la communauté hippie se définit autour d’une sorte de profession de foi idéologique, la communauté geek prend d’abord son sens dans l’action.

La révolution digitale a considérablement fluidifié les rapports humains. Elle permet de trouver plus facilement les gens susceptibles de former une communauté réussie puisque n’importe qui peut potentiellement interagir avec le monde entier. D’où ce paradoxe d’une société individualiste où l’on ne cesse de parler de nouvelles communautés.

Ces nouvelles communautés sont incroyablement dynamiques. Leur niveau d’intelligence collective (crowdsourcing, cloud, open source) est infiniment supérieur aux anciennes. Les Anonymous ne vivent pas tous ensemble dans une ferme et ne se connaissent pas entre eux mais ils forment néanmoins une communauté efficace, unie ponctuellement autour d’objectifs concrets, rassemblée sous le même étendard.

Le mode opératoire

Les communautés hippies se sont constituées comme un rejet de la société de l’époque. Elles se définissent d’abord par opposition. Les hippies s’inscrivent en marge de la société dominante. À l’inverse, le geek va généralement chercher à agir au sein même du système.

Le hippie rejette le système, le geek hack le système.

Le mouvement hippie est fortement influencé par des artistes (musiciens, écrivains, peintres, poètes). Ils poussent un cri d’indignation face à un nouveau monde mercantile déshumanisé. Plus qu’une réelle alternative sociale, le mouvement hippie est surtout une salutaire prise de distance, un coup de pied dans la fourmilière.

Le cyber activiste (hacktiviste) cherche lui à construire un nouvel habitat viable. Il est plus concrètement tourné vers l’action. Il y a souvent chez les hippies un rejet de toute forme d’organisation. Or, une communauté doit être organisée pour être efficace. Les geeks à l’inverse sont obsédés par les nouveaux modes d’organisation.

Le geek n’est pas dans une logique de repli mais plutôt dans une dynamique d’infiltration.

Le mouvement hippie fait partie de notre patrimoine et les leçons ont été tirées. Cet élan a eu un impact global et définitif sur les mentalités. Certaines portes ont été ouvertes. D’autres seront bientôt crochetées.

 

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