Mutinerie, libres ensemble - espace de coworking à Paris » William http://www.mutinerie.org Libres ensemble Wed, 20 Aug 2014 08:44:33 +0000 fr-FR hourly 1 Aux Frontières du Bullshit http://www.mutinerie.org/aux-frontieres-du-bullshit/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=aux-frontieres-du-bullshit http://www.mutinerie.org/aux-frontieres-du-bullshit/#comments Fri, 18 Apr 2014 13:53:53 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=28145 Qui parmi ceux qui naviguent dans les sphères de l’innovation ou dans les cercles artistiques n’a jamais été confronté au bullshit ? Nous avons tous connus ces discours décousus, ces prophéties ésotériques annonçant la prochaine révolution, ces créateurs exaltés du nouveau réseau social qui va emporter la planète, des VRP bon marché d’un futur idyllique,...

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Qui parmi ceux qui naviguent dans les sphères de l’innovation ou dans les cercles artistiques n’a jamais été confronté au bullshit ? Nous avons tous connus ces discours décousus, ces prophéties ésotériques annonçant la prochaine révolution, ces créateurs exaltés du nouveau réseau social qui va emporter la planète, des VRP bon marché d’un futur idyllique, ces analystes alambiqués et ces discours en forme d’enrobages prometteurs pour des concepts rebattus…

C’est souvent drôle, parfois tragique et toujours un peu énervant. Mais n’est-ce pas non plus intrinsèquement lié à tout milieu créatif ? Athènes et ses sophistes, proto-bullshiteurs de l’antiquité. Paris du XIXème et ces mondains oisifs et vains gravitant autour des cercles intellectuels et artistiques, Berlin aujourd’hui et ses artistes perdus dans la drogue. San Francisco, où les grands innovateurs côtoient les plus grand imposteurs.

Partout où naissent de grandes choses, le bullshit n’est jamais loin !

J’ai essayé de comprendre ce curieux phénomène…

bullshit

Bullshit rétroactif

Toute innovation repose sur des intuitions, puis des hypothèses que l’on va tester, confronter à la réalité et éventuellement valider. C’est particulièrement vrai chez les startups dont l’objectif est de valider progressivement des hypothèses jusqu’à trouver une viabilité, une loi universelle, ou du moins réplicable.

L’innovation évolue dans un tas d’erreur. Pour un projet qui réussi à innover et à se déployer, combien sont ceux qui ont avorté ?

Lorsque l’erreur est attestée, l’hypothèse avancée est rétrospectivement rangée dans la catégorie Bullshit.

On pense aux médecins charlatans de Molière prônant saignées, lavements et régimes improbables à tour de bras ! Facile d’en rire aujourd’hui, mais à l’époque, ces médecins et une bonne partie des patients croyaient dur comme fer à leurs médications.

Avant que l’hypothèse ne soit validée, l’innovation réside dans une zone fragile où tout peut arriver. Si elle est validée, chacun considérera l’innovation comme une évidence, qui chose étrange n’avait pas été perçue avant. Si elle échoue, chacun trouvera d’excellentes raisons d’expliquer combien l’idée était minable et combien, eux l’avaient vu venir…

Pensez à tous les projets et théories actuelles dont nous nous moquerons demain et si par hasard, vous êtes vous-même l’auteur d’une théorie ou d’une innovation qui s’est révélée invalide, peut-être vous verrez vous considéré comme un bullshiteur devant l’Eternel ! Puisque l’erreur est inhérente à la recherche, elle est un prix à payer pour l’innovation.

Bullshit Exalté

Poser une hypothèse, c’est toujours assez risqué. C’est un parti-pris, une avance imprudente sur la réalité de demain, un terrain glissant. Car une hypothèse innovante est toujours marginale et la marge est un chemin de crête ! D’un coté, la convention et le risque de la banalité, de l’autre la déconnexion d’avec la réalité et le risque du néant.

Les startups ont comme mission de transformer du virtuel en réel. Et ce travail demande une certaine distortion de la réalité.

Cette sorte d’hypothèse sociale implique de convaincre les autres de la réalité de quelque chose qui n’existe pas encore ou du moins, qui ne s’est pas encore déployé à une échelle suffisante. C’est presque un acte de foi ! Et cette foi suscite des exaltations avec ses prophètes et ses charlatans, ses doux-rêveurs et ses zélotes, ses visionnaires et ses fanatiques … Bref, le meilleur et le pire ce que que la foi peut engendrer.

C’est particulièrement vrai dans l’innovation sociale où le succès d’un projet dépend largement de l’adhésion d’un large nombre de personnes à des idées ou des modes d’organisation. En sociologie, le réel est une notion relative. La réalité sociale, c’est la convention partagée sans même être consciemment pensée. Et le virtuel, c’est la marge.

Le bullshit exalté survient lorsque, confronté à une contradiction entre l’hypothèse et sa confrontation avec le réel, on préfère nier, se contorsionner ou réinterpreter l’évidence des données, se réfugier dans un niveau d’abstraction ou de complexité supplémentaire, dire que les mauvais résultats deviendront bons si on continue la même chose mais à plus grande échelle etc.

Bullshit Courtisan

ôtez à nos savants le plaisir de se faire écouter et le savoir ne sera rien pour eux

Rousseau

L’innovation, par les temps qui courent, ça brille ! Et le brillant attire les courtisans.

Voici la plus terrible catégorie de bullshit, un bullshit qui ne mérite que très peu de clémence, le bullshit courtisan ! Il se croise souvent parmi les experts et les spécialistes, les professeurs ou les évangélisateurs sévissant au détriment des vrais connaisseurs et des authentiques promoteurs d’un mouvement ou d’une innovation.

Ce bullshit est bien souvent toléré car le courtisan sert l’intérêt à court terme des innovateurs ; il est très connecté, et parle beaucoup. Parfois même, il parle bien. Il permet donc de faire connaitre et de faciliter la diffusion des innovations.

En fait, derrière le prétexte de la chose elle-même, les logiques sous-jacentes du bullshit courtisan sont tout simplement celles des égos. Le plaisir et le pouvoir que peuvent procurer le fait d’être considéré comme un « Expert en », un « Spécialiste de » est une matrice inépuisable d’un bullshit sans merci !

L’expert courtisan est tenté de sombrer dans la complexité bullshiteuse car cette complexité fait croire à l’étendue d’une connaissance si vaste que le profane ne peut tout à fait comprendre, et aussi parce que son sujet d’étude est son fond de commerce. Lorsque tel champ d’étude ou telle méthode révolutionnaire s’est révélée être une fausse piste, il ne reste que le bullshit à ces experts pour pouvoir justifier leur utilité et donc leur rémunération.

Après ce tour d’horizon du bullshit -dont vous estimerez vous-même sa teneur en bullshit-, ne soyons pas trop dur envers ce phénomène et accordons lui une certaine clémence. D’abord parce il est fondamentalement humain, mais également par soucis de prudence tout à fait personnelle; nous serons peut-être les bullshiteurs de demain ! Méfions nous car on peut se retrouver à bullshiter en toute bonne foi avec les meilleures intentions du monde et une belle idée de départ.

Les inconnues vertigineuses qu’entraine chaque innovation, les erreurs et les tâtonnements inhérents à la création, la nécessité de susciter l’adhésion, la difficulté de revenir sur ses erreurs et l’attrait personnel que l’on peut avoir pour le nouveau sont des facteurs qui génèrent inévitablement du bullshit.

Dans cette zone de combat entre les idées et le réel, tout peut être dit et rien ne peut être définitivement validé.

Cela explique sans doute pourquoi dans cet intervalle peut germer et croitre à la fois autant de génie et autant de bullshit ! La fumeuse phrase de Marx résonne plus que jamais à nos oreilles; « L’innovation porte en elle le bullshit comme la nuée porte l’orage »

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Les ingrédients de la participation http://www.mutinerie.org/les-ingredients-participation/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-ingredients-participation http://www.mutinerie.org/les-ingredients-participation/#comments Fri, 07 Mar 2014 15:31:36 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=27941 Un évènement participatif réussi est une alchimie délicate; il doit être utile, simple, bien préparé et enrichissant. Retour d'expérience mutine.

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Depuis trois ans que nous baignons nuit et jour dans un environnement collaboratif, nous commençons à avoir une expérience et des connaissance solides sur ce qui fait le succès (et ce qui cause les échecs) des évènements collaboratifs. Nous avons organisé, accueilli, conçu et favorisé un nombre incalculable d’évènements impliquant une mobilisation collective et ponctuelle. Des premiers exercices de co-fabrication de mobilier pour l’ouverture de Mutinerie aux opérations Coup de Foin à Mutinerie Village en passant par des  Startup weekends, DiscoSoupes, Hackatons, distributions de Ruche Qui dit Oui, Repair Cafés, Workshops en tous genres, nous en avons vu passé et voici quelques enseignements que j’ai pu en tirer.

Voici quelques principes de bon sens pour réussir un évènement participatif :

Utile

Il est contre productif de « faire du participatif » pour l’amour de l’art. Ce constat, d’une évidence consternante n’en est pas moins utile car nombreux sont ceux qui, partant de la noble cause d’impliquer leur communauté accordent plus d’importance à la méthode participative qu’à l’objectif de réalisation dont il est question.

N’oublions jamais que la méthode, participative ou non, n’est qu’un moyen de réaliser un objectif et non la finalité elle-même.

Pourquoi mobiliser des gens qui vous suivent et qui vous font confiance pour une mission dans laquelle leur présence n’a pas de réelle utilité ? Même si l’envie de participer est réelle, il faut garder en tête que les participants seront déçus s’ils sentent que leur contribution n’est pas réellement utile. Pour cette même raison, pensez à bien dimensionner le nombre de participants afin que personne ne se sente en trop ou se décourage constatant que la tâche est insurmontable faute d’effectif suffisant.

Simple

La simplicité est une clé essentielle dans la réussite de tout système participatif. Un évènement de production participative doit rester simple dans ses objectifs. Les missions qui fonctionnent le mieux sont celles qui ressemblent le plus à une ligne droite (quand bien même la pente serait raide!) ; sérigraphier 150 Tee-Shirt en vue d’un évènement, fabriquer tel mobilier, éplucher des légumes en musique pour faire une soupe/salade géante, voila le type de réalisation qui fonctionnent parfaitement avec un modèle participatif.

Dans tous les cas, les discussions ne devront jamais devenir des sortes de méta-débats stratégico-philosophiques, abstraits, idéologiques… Cela ne génère que de la confusion et de la frustration. L’organisateur est la force de synthèse, force que vous devez assumer après avoir consulté qui de droit. Le jour de l’évènement, soyez au clair sur les objectifs et les grandes lignes de la méthode.

L’objectif doit rester simple sur le fond, mais les participants doivent avoir le choix dans les tâches à faire et la façon de les faire. Il ne s’agit pas de tout noyauter, mais au contraire de laisser les choses très ouvertes dans les méthodes de travail et les choix des tâches tout en s’assurant que chacun connaisse bien les objectifs de production. Dans ces conditions, une forme de créativité et d’organisation organique naturelle se forme et l’on voit les participants progresser et se « spécialiser » naturellement. Chacun allant vers ce qu’il sait faire de mieux et les bonnes astuces se transmettent naturellement.

Bien préparé

Une autre erreur fréquente qui revient souvent lorsque l’on organise un évènement collaboratif, est de considérer qu’il suffit de rassembler des gens de bonne volonté pour que la magie survienne.  En réalité, un évènement participatif réussi demande une organisation importante et spécifique car il ne s’agit pas tant de définir des « process » qu’un cadre favorable. Et créer le bon environnement demande un vrai travail et une autre forme de méthode à laquelle nous n’avons pas été habitué par nos études ou par le fonctionnement classique d’une entreprise.

1+1 peut valoir 3 ou rien du tout. La force d’un groupe est une alchimie délicate.

Voici quelques points essentiels pour préparer un évènement participatif :

  • Tester en amont le montant de travail que ça représente et se donner un objectif réaliste.
  • Prévoir un emploi du temps relativement précis et le tenir
  • S’entourer de connaisseurs : Il suffit d’un ou quelques fins connaisseurs du sujet et le travail du groupe entier en sera considérablement plus efficace, gratifiant et instructif.
  • Rentrer très vite dans le vif du sujet. Cela donnera le ton et l’impulsion pour la suite. L’identité et la « trajectoire » d’un groupe se forgent dès le début. Une fois bien lancé, il peut avoir une force de frappe énorme mais si cette étape est loupée, il devient terriblement difficile de rectifier le tir.

Enrichissant

Enfin, pour qu’un évènement participatif réussisse, il doit être enrichissant pour les participants. Il est une proposition à tester des choses inédites, à changer de cadre, à créer du bien commun…

Dans ce type d’évènement, un échange se crée et conditionne son succès ; les participants apportent leurs idées, leurs expériences, leur travail, les organisateurs apportent des rencontres humaines, de la connaissance technique et la possibilité de vivre une expérience positive.

Le travail contributif se célèbre. Prévoyez donc des moyens de réjouissances qui permettent de marquer le coup, de renforcer les liens et de remercier les participants. Ayez le soucis constant de faciliter la transmission des savoirs et la discussion entre les participants et soyez créatif dans les missions à mener en laissant les meilleurs morceaux de la bête aux participants et en ayant pris sur vous les tâches les moins intéressantes lorsque vous le pouvez.

La Communauté BD de tranquerelle

Le travail participatif bien mené et utilisé à bon escient peut être non seulement un moyen incroyablement efficace pour mener à bien des choses que l’on n’aurait pas pu faire seul et génère en même temps énormément d’externalités positives; rencontres humaines, création de liens, sérendipité, apprentissage de compétences, découverte de talents …  Ces externalités générées deviennent un bien commun qui bénéficiera à toute la communauté et fera sans doute germer de nouvelles idées, de nouveaux projets et de nouveaux liens.

 

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Démocratie et jeux de société http://www.mutinerie.org/democratie-jeux-societe/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=democratie-jeux-societe http://www.mutinerie.org/democratie-jeux-societe/#comments Mon, 06 Jan 2014 02:59:47 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=27580 Un système participatif efficace tire sa force des contributions libres et volontaires de ses membres, voila pourquoi il ne se décrète pas. La seule chose vraiment valable pour recréer les conditions de la participation, c'est de créer un bon jeu c'est à dire un jeu simple dans ses règles et riche dans ses dynamiques.

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Les jeux de sociétés portent bien leur nom puisqu’ils offrent énormément  d’analogies avec le « jeu démocratique » et même plus généralement avec le jeu que nous acceptons tous plus ou moins de jouer dans la société. Le statut de joueur et celui de citoyen partagent de nombreuses similitudes.  Voici quelques enseignements que j’ai pu tirer de mes longues soirées ludiques et fiévreuses avec mes comparses, ou seul entre deux parties de Starcraft à pas d’heure du matin (vous pourrez également lire quelques autres enseignements starcraftiens ici)…

A la base du jeu de société comme des jeux que l’on joue dans la société, il y a les règles. Sur un plateau de jeu, celles-ci sont claires, partagées, comprises et applicables par tous. C’est dans ces conditions que le jeu est possible, que les joueurs ont envie de participer, de déployer des trésors de malice et de coups plus ou moins fourrés. C’est dans ces conditions; règles simples et dynamiques complexes que chacun peut exprimer ce qu’il est et prendre plaisir à participer à une dynamique collective.

Le citoyen est la base de la démocratie comme le joueur est la base du jeu. Tous deux partagent des objectifs et des contraintes communes et d’autres plus individuelles. Ils interagissent entre eux et avec l’univers via des règles ou des lois.

Le jeu, c’est tout ce qu’on fait sans y être obligé Mark Twain

Si l’on veut créer un système participatif efficace, il est indispensable que les acteurs qui agissent le font sans y être obligé. Car un système participatif tire sa force des contributions libres et volontaires de ses membres, voila pourquoi il ne se décrète pas. La seule chose vraiment valable pour recréer les conditions de la participation démocratique, ou de toute autre forme de système participatif, c’est de créer un bon jeu.

Qu’est-ce alors qu’un bon jeu ?

Democracy-the-Game

Simplicité des règles, complexité des dynamiques

On dit que maitriser les échecs prend des années mais apprendre les règles ne requiert que dix minutes. La complexité aux échecs ne vient pas des règles, mais des dynamiques. Un nombre quasiment infini de paramètres rentre en compte et pourtant cet ensemble repose sur quelques règles qu’un enfant de 5 ans peut assimiler.

Où est la complexité ? elle n’est pas dans les règles à ingurgiter mais dans les décisions à prendre.

Dans le monde réel, les règles du jeu sont nettement moins claires et ce manque de clarté biaise le périmètre du jeu. Il se déplace alors d’un cran et la règle du jeu consistera désormais à trouver quelles sont les règles du jeu ! On ne craindra alors non plus la Loi, mais le juge. Voila dans quelle disposition d’esprit se trouvent la plupart des citoyens actuellement.

L’égalité agitée comme étendard par ceux-là même qui fabriquent des règles si opaques, si peu applicables ne restera au mieux qu’un voeux pieux, au pire, qu’une vaste hypocrisie. Les philosophes des Lumières luttaient contre l’arbitraire du pouvoir, fait de la tyrannie des monarques, mais une autre forme d’arbitraire s’installe lorsque les lois devenues trop nombreuses, empêchent de savoir si ce que l’on envisage de faire se situe ou pas dans le cadre légal.

La loi est implacable, mais la loi est imprévisible. Nul n’est censé l’ignorer, mais nul ne peut la connaître. Georges Perec

Finalement, quand bien même les règles seraient théoriquement les mêmes pour tous, le fait qu’elles ne soient pas connues d’avance par tous revient dans les faits à recréer les dynamiques de l’arbitraire. C’est, dans les faits ce qui se passe lorsque les règles du jeu deviennent si compliquées que seuls quelques-uns peuvent connaitre  les règles (ou payer des gens qui les connaissent).

Puisque il n’y a pas de participation possible dans un jeu où seuls quelques-uns connaissent les règles et puisque la démocratie repose sur la participation des citoyens, il n’y a pas de démocratie efficace sans règles simples, applicables et compréhensibles par tous.

Etienne Chouard comprend la démocratie comme un mode de gouvernement d’amateurs, destiné avant tout à tenir à l’écart les preneurs de pouvoir. N’importe quel citoyen doit être en mesure de connaitre, et de pouvoir modifier la loi.

Nul n’est censé ignorer la loi ne doit pas être une idée théorique en démocratie, mais une réalité. Le problème est qu’avec 10 500 lois et 127 000 décrets nous ne sommes pas dans une configuration propice à la mise en pratique de ce principe… Pensez-vous un instant qu’un jeu de société avec 128 000 règles différentes aurait une chance de trouver des joueurs enthousiastes ? Inflation législative L’absence de simplicité tue la participation et l’esprit démocratique. L’absence de simplicité profite à ceux qui ont intérêt à dissimuler, à contourner, à tricher, à ceux qui savent que les meilleures pêches se pratiquent en eaux troubles… A l’inverse, la simplicité est la première garante de l’égalité.

Lorsque l’on perd aux échecs face à un maitre de la discipline, on sait que l’on joue néanmoins au même jeu et que la seule différence entre lui et nous, c’est qu’il a consacré des milliers d’heures de plus que nous à travailler pour s’améliorer.

Un monde complexe ne justifie pas des lois complexes

Naturellement, après ce que vous venez de lire, on pourrait rétorquer que tout ceci est bien naïf et loin de la réalité du monde qui lui est complexe. Et c’est vrai que les sociétés humaines n’y sont pour rien si la nature est elle-même un vaste ensemble exubérant, plein de frictions, d’interactions et d’exceptions. On ne comprend même pas le quart des lois qui régissent l’univers et qui semblent souvent se contredire alors peut-on reprocher aux sociétés humaines de s’être adaptées en engendrant des lois complexes ?

Effectivement, on vit dans un monde complexe mais d’abord, est-ce une raison pour en rajouter une couche ? Si l’on n’avait pas à passer autant de temps à comprendre les règles du jeu social, on pourrait en consacrer davantage à la compréhension du vaste monde …

La simplicité n’a pas besoin d’être simple, mais du complexe resserré et synthétisé. Alfred Jarry

Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’un système complexe ne peut se comprendre avec des règles complexes, il exige au contraire d’inverser cette logique et d’embrasser la complexité en prenant en compte notre ignorance. Lorsque l’on part en randonnée, on sait par avance que l’on va rencontrer un environnement complexe et changeant. La neige, le vent, le froid, le risque d’orage, l’état d’entretien des sentiers… Ce genre de chose empêche de savoir à l’avance le succès de notre entreprise, notre vitesse de progression ou l’exigence physique requise. Pour faire face à ces risques, il faut avoir dans son sac à dos l’équipement qui permet de faire face à l’inconnu. Bien sûr qu’il est utile de regarder la météo et souhaitable de programmer un itinéraire, mais il est surtout vital d’avoir sur soi de quoi faire face aux imprévus.

La loi ne doit pas prétendre connaitre la météo ou elle court à l’échec, car la météo; système complexe n’est jamais fiable à 100%, elle doit être le contenu de notre sac à dos.

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Travail numérique, travail paysan, même combat ? http://www.mutinerie.org/travail-numerique-travail-paysan-meme-combat/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=travail-numerique-travail-paysan-meme-combat http://www.mutinerie.org/travail-numerique-travail-paysan-meme-combat/#comments Sun, 27 Oct 2013 09:33:16 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=27330 A l'heure ou Mutinerie se prépare à l'exode urbain, on s'aperçoit que l'organisation du travail numérique et l'organisation rurale traditionnelle se ressemblent étrangement. L'organisation rurale peut-elle être un modèle pour les travailleurs de l'économie numérique ? Et l'économie numérique ne réhabilite-elle pas certaines logiques dominantes avant la révolution industrielle ? C'est ce qu'on va voir ...

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Le travailleur du XXI ème siècle est-il en train de revenir, sans s’en apercevoir au mode d’organisation du travail paysan traditionnel ? Cette question peut paraitre saugrenue de prime abord tant l’image du développeur devant son ordinateur peut paraitre éloignée de celle du paysan. Mais pourtant, si l’on va au delà des outils et des supports, on s’aperçoit qu’au delà de la nature des tâches effectuées; les modes d’organisation ne sont pas si différents.

Dans l’économie numérique, on parle de pollinisation, d’écosystème, de viralité … Autant de termes empruntés aux logiques biologiques. Et ce n’est pas complètement un hasard. Les logiques biologiques inhérentes à la production agricole se retrouvent dans l’économie numérique et impliquent des méthodes de production sans doute plus proches entre elles que de celles héritées de l’âge industriel.

Voici à mon sens, les principaux points communs entre le travail agricole et le travail numérique :

Des systèmes complexes 

Le travail industriel manipule essentiellement de la matière inerte (charbon, métal, béton etc.) soumise à des lois strictes et invariables, les lois de la physique, de la résistance des matériaux … En terme d’organisation, des lois invariables permettent de construire des modèles fiables et optimisés et autorise donc un travail standardisé aux horaires fixes et aux procédures rigoureuses. C’est ainsi que l’on a pu écrire des formules affirmant que la production était la résultante d’une certaine combinaison entre le travail et le capital, chose qui ne s’applique correctement ni à l’économie agricole traditionnelle, ni à l’économie numérique.

Portés par ces croyances héritées du succès dans nos méthodes industrielles, nous avons commencé à les appliquer dans l’agriculture. Le problème, c’est que l’agriculture travaille à partir du vivant, soumis à d’autres lois. Car le vivant, attrape des maladies, craint les averses de grêle et interagit avec d’autres êtres vivants. Le vivant est en interaction constante avec son environnement, qui le modifie et qu’il peut lui-même modifier.

Autrement dit, manipuler du vivant c’est manipuler un système complexe, et la création de valeur dans un système complexe fonctionne de manière radicalement différente.

Qui dit système complexe dit absence de rétroaction systématique, de capacité à prévoir, à généraliser ou à systématiser car le nombre d’acteurs en interaction est trop grand et leurs liens sont trop enchevêtrés. Ainsi, selon Wikipédia une réaction chimique, comme la dissolution d’un grain de sucre dans du café, est simple car on connaît à l’avance le résultat : quelques équations permettent non seulement de décrire les processus d’évolution, mais les états futurs ou final du système. Il n’est pas nécessaire d’assister au phénomène concret ou de réaliser une expérience pour savoir ce qui va en résulter en réalité. Au contraire, les cellules nerveuses de notre cerveau, une colonie de fourmis ou les agents qui peuplent un marché économique sont autant de systèmes complexes car le seul moyen de connaître l’évolution du système est de faire l’expérience, éventuellement sur un modèle réduit.

Organisation par écosystème

La seule approche valable dans un système complexe est holisitique, puisque la somme de l’ensemble ne peut être réduite à l’addition des éléments qui le compose.

On ne peut appréhender un élément que dans son écosystème, c’est à dire en tenant compte dès le départ de ses interactions avec les autres agents.

L’économie rurale traditionnelle intègre cette logique. Les parties non consommées du blé font du foin pour le bétail, dont les déjections font ensuite de l’engrais pour les récoltes. les ruches à proximité des vergers aident les arbres à produire plus de fruit tout en produisant du miel. Les habitants s’aident mutuellement pour les récoltes, les paysans échangent leur outils et mutualisent les ressources. La clé du succès agricole n’est pas seulement dans la capacité de travail ou la rigueur de l’organisation de son entreprise mais également dans la richesse de l’environnement alentour. L’entité exploitation agricole ne se distingue pas entièrement de son environnement et ne peut être vraiment analysé sans lui. L’économie rurale traditionnelle est donc une économie circulaire et collaborative comme le devient de plus en plus l’économie numérique.

Que se soit la Silicon Valley, la scène berlinoise ou les autres lieux réputés féconds sur les domaines de l’économie numérique, on retrouve cette logique d’écosystème où le succès d’un agent s’explique largement par la richesse du terreau qui lui a permis de naitre et de grandir.

Capacité d’observation, disponibilité et sérendipité

Le paysan, comme le designer web savent parfaitement que la productivité n’est pas linéaire. On aura beau être le plus rapide du monde pour semer, pour récolter. Si l’on n’est pas présent au moment où la sécheresse s’installe ou lorsque la grêle s’abat sur les récoltes, la production finale sera en partie détruite. De même s’il n’observe pas à temps l’arrivée de parasites ou de maladies.

Ainsi, pour le paysan, la productivité est liée à une forme de disponibilité et de vigilance dans des moments aussi importants qu’imprévus plus qu’à une capacité d’exécution stakanoviste.

Le designer, à la recherche de l’idée brillante pour repenser l’expérience utilisateur d’un service en ligne sait que celle-ci pourra surgir lors d’une discussion anodine ou en observant le fonctionnement de son restaurant d’à coté… Il en va de même pour des pans entiers du travail numérique dans lequel la créativité, la veille, la disponibilité  et la capacité à saisir des opportunités nées de l’environnement sont indispensables.

Polyvalence et indépendance 

Comme le travailleur numérique, le paysan traditionnel est la plupart du temps indépendant et polyvalent. il travaille « en mode projet » sur des missions souvent différentes. le bricolage d’une clôture n’a rien à voir avec l’entretien de ses vignes ou la vente de ses produits sur le marché et pourtant, toutes ces tâches sont essentielles à la réalisation du projet central.

Ils sont des « hommes-projets » et non pas des « hommes-fonctions » ce qui implique une grande polyvalence et un art consommé de la démerde.

Esprit de Bidouille

Dans l’économie numérique, beaucoup s’extasient régulièrement sur le Lean et les principes de cycles courts d’essais, d’implémentation et de pivot. On met en avant l’esprit de bidouille des travailleurs du numérique, du développeur, du hacker mais ces logiques se retrouvent déjà depuis des siècles dans l’agriculture où l’on fonctionne par test et implémentations successives. Cette terre parait bonne pour les asperges ? essayons à petite échelle et voyons si cette hypothèse est validée. Cette variété me parait plus adaptée à mon environnement ? testons-la…

L’esprit de bidouille est une qualité majeure pour évoluer plus aisément dans un système complexe dans lequel l’expérimentation est la clé de la compréhension.

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Le futur du coworking http://www.mutinerie.org/futur-du-coworking/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=futur-du-coworking http://www.mutinerie.org/futur-du-coworking/#comments Sat, 14 Sep 2013 13:37:14 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=27174 Le futur du coworking n'est pas écrit, mais nous voyons se dégager quelques tendances de structuration du mouvement. A l'heure où le mouvement commence à devenir une tendance massive, les pionniers se demandent quelle sera la prochaine étape, les entreprises traditionnelles cherchent à lancer leurs propres initiatives et les pouvoirs publics suivent le mouvement de près. A quoi ressemblera le coworking dans cinq ans ? Mutinerie vous livre son point de vue.

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On le sent, on le voit ; le coworking commence à sortir de l’ombre pour devenir une solution viable  et clairement identifiée auprès des entrepreneurs et des freelances des pays occidentaux. L’histoire du coworking est déjà riche et le mouvement commence à sortir de la marge d’où il est apparu.

 La preuve du concept a été faite. Ceux qui ont essayé le coworking ont compris l’immense valeur qui y réside et ceux qui observaient la tendance, en embuscade, sont prêts à se lancer dans l’aventure.

Mais dans le même temps, les espaces existants cherchent encore à valider un modèle économique. Les espaces les mieux établis se demandent quant à eux quelle sera la prochaine étape. Ouvrir d’autres espaces en leur nom ou via un réseau de franchises ? Partir en quête d’un local plus grand ? Développer des services pour la communauté ? Comment et où trouver l’argent qui financera la croissance ?

Aucune réponse n’est évidente mais puisque Mutinerie a le nez dans toutes  ces questions, j’ai pensé faire part ici de nos réflexions. La principale difficulté à mon sens, c’est de savoir dans quelle mesure le coworking, centrée sur la communauté et non sur le lieu, peut-il être réplicable. Chaque communauté possède son alchimie propre ; résultat du mélange unique des individus qui peuplent l’espace. Cette alchimie devient rapidement l’identité du lieu, puis de la marque toute entière. Chaque espace est ainsi unique et donc difficilement réplicable ou du moins, elle ne se réplique pas comme une chaine de fast food.

Pour savoir où aller, il n’existe que peu de précédents. Ceux que Mutinerie est allé dégotter se situent le plus souvent à d’autres époques et dans d’autres contextes. Que l’on parle des monastères, des Kibboutzim, des ateliers d’artistes ou des coopératives ouvrières du XIXème siècle, on reste dans des contextes différents de notre étrange XXIième siècle.  Malgré l’inspiration précieuse que l’on a pu puiser chez nos aïeux, il faudra essentiellement miser sur notre discernement et la confiance que nous avons dans les changements majeurs à l’œuvre dans notre époque.

Pour y voir plus clair, voici quelques hypothèses de l’évolution du coworking pour les prochaines années.

Evidemment, celles-ci sont volontairement extrêmes et la réalité ressemblera plus à une hybridation des genres qu’à une orientation de tout le mouvement vers un seul modèle. Cela dit, l’exercice a le mérite de souligner les forces structurantes qui travaillent le mouvement du coworking en France et dans le monde.

1. La Stratégie Starbucks

Dans cette configuration, le marché du coworking a fait ses preuves. Les acteurs plus traditionnels types Google, Bouygues, Cisco, Orange, s’y intéressent. Ils se lancent dans le bain et ouvrent un grand nombre d’espaces plus froids mais fonctionnels à proximité d’espaces existants et cassent les prix. Les espaces historiques ne peuvent s’aligner et les acteurs majeurs qui peuvent assumer ce déficit de trésorerie sur trois ans finissent par l’emporter.

2.La fusion entre les entreprises et le coworking

Les entreprises traditionnelles luttent. Elles n’innovent pas assez vite, les marges s’affaiblissent, les talents partent. Elles se retrouvent avec des biens immobiliers en surplus. Elles savent que les logiques coworking sont porteuses d’innovation. Elles décident donc d’allouer une partie de leurs locaux à des indépendants de passage de manière gratuite. Le coworking devient une extension logique d’une entreprise et permet de fédérer une communauté autour de l’entreprise et de puiser dans un vivier de jeunes talents passionnés.

3. L’émergence d’un acteur principal

Un acteur du coworking émerge comme la référence et adopte une stratégie de développement extensive réussie. Il multiplie les lieux et parvient à allier communauté et efficacité en créant des synergies opérationnelles. Le nombre d’espace se multiplie, mais le nombre d’acteurs baisse. Ce scénario correspond à une structuration relativement classique d’un marché.

4. Le coworking public

Les Etats et les collectivités territoriales comprennent et veulent accompagner les mutations du travail, favoriser l’innovation et l’entrepreneuriat. Ils se mettent à développer des espaces aux prix très compétitifs car subventionnés directement ou via des associations. Plus de gens peuvent accéder au coworking mais le mouvement perd de son indépendance, de sa créativité et de son authenticité. Les initiatives privées deviennent moins compétitives.

5. La constitution d’une fédération d’espaces indépendants

Dans ce scénario, les différentes initiatives indépendantes existantes réussissent à s’organiser en une sorte de fédération et parviennent à créer des synergies entre elles, monter en compétence et fluidifier l’expérience des coworkers pouvant voyager d’un espace à l’autre. Le coworking s’organise donc de manière décentralisée, en réseau, autour d’espaces influents et de communautés autonomes mais en interaction.

Notre orientation

Parmi ces différents scénarios, Mutinerie penche clairement pour la dernière option.

Nous souhaitons que le coworking s’organise en une constellation d’espaces indépendants mais fortement connectés.

Après tout, en tant que créateurs d’espaces de coworking, nous voulons que les coworkers soient libres et indépendants mais qu’ils puissent s’ils le souhaitent, travailler, s’organiser et agir ensemble. Le prolongement naturel de cette pensée, c’est qu’à l’échelle des espaces, eux aussi restent libres, indépendants mais puissent également s’organiser ensemble.

C’est la ligne qui nous paraît la plus proche des valeurs du coworking, la plus originale et la plus excitante.

Nous avons l’occasion de montrer que le coworking, né de la base peut réussir à se structurer par la base. Qu’il est capable de déployer à grande échelle le modèle d’organisation que nous avons mis en place au sein de nos espaces. Nous avons l’occasion de voir ce que peut vraiment donner la coopération à grande échelle d’un ensemble de personnes libres et indépendantes. La période qui vient sera cruciale !

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Voici la suite, et la fin de ma série sur les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Ces derniers mois ont été particulièrement chargés à Mutinerie et, à ma grande frustration, je n’ai pas pu trouver le temps de continuer à écrire. Faisons donc un petit bilan. Nous nous étions penchés sur des lieux, des époques et des initiatives complètement différentes, en commençant par les monastères à l’époque médiévale, les Kibboutz puis les ateliers d’artistes au XIXème siècle. Cette fois-ci encore, on change d’ambiance pour étudier les coopératives ouvrières et leurs influences sur les façons de travailler depuis l’époque où elles sont nées jusqu’à nos jours.

Pourquoi et comment sont-ils nés ?

A l’heure ou les premières coopératives apparaissent, l’Europe, qui s’industrialise rapidement, sort d’un monde où l’essentiel des travailleurs sont des agriculteurs ou des artisans indépendants. A cette époque, ces indépendants s’organisent en communautés (de villages et corporations de métiers). Chacun travaille avec ses propres outils et ses propres techniques. Les outils les plus coûteux sont souvent partagés entre les différents travailleurs d’une même communauté.

Quant aux autres métiers, ils sont la plupart du temps structurés au sein de corporations, jurandes ou compagnonnage  aux règles extrêmement codifiées qui prennent en charge les artisans de leur apprentissage, jusqu’à leur maitrise, qui régulent les prix, formalisent les bonnes pratiques et arbitrent en interne les tensions. Le salariat est souvent un mode d’apprentissage transitoire plutôt qu’un statut définitif. Malgré leurs défauts (fermeture excessive, organisations patriarcales, freins à l’innovation et aux nouveaux entrants, peu de sens de l’intérêt du plus grand nombre, manque de transparence…) les corporations protègent relativement bien le travailleur et les intérêts des corps de métier qu’elles exercent.

Mais sous la pression croissante du capitalisme industriel, le travail commence à subir une transformation radicale, dans ses objectifs et ses méthodes.

Les corporations, et de manière générale, toutes les formes de solidarités professionnelles, sont devenues un obstacle à l’ascension des premiers empires industriels.

Elles gênent la libre détermination des prix, elle entravent les lois de la concurrence, de la circulation des hommes et des marchandises et résistent aux méthodes d’organisations des grandes entreprises.

Au sein des entreprises industrielles, les travailleurs se retrouvent progressivement seuls face à ceux qui possèdent les outils. Le statut salarié se généralise et devient un mode de travail durable. Il s’agit d’un moment inédit dans l’histoire des hommes.

Si l’on considère en même temps l’exode rural qui accompagne ce mouvement et qui déracine les gens de leurs attaches traditionnelles, on mesure un peu mieux l’étendue de la perte que subissent des millions de travailleurs en Europe. Perte de leurs outils, de leurs réseaux, de leurs cultures et finalement de leurs libertés.

C’est la Révolution Française qui supprime les corporations car elle les considère comme des institutions au services d’intérêts particuliers qu’elle prétend combattre. La fameuse loi Le Chapelier de 1791 les rend illégales. Le message est clair :

Il n’y a plus de corporation dans l’État ; il n’y a plus que l’intérêt particulier de chaque individu et l’intérêt général

Une bien belle parole qui se traduit concrètement par des réalisations un peu moins flamboyantes. Car comme le disait Antoine, dans l’un de ses articles, l’intérêt général est essentiellement le résultat d’un rapport de force. C’est celui qui est capable, dans un groupe donné, de récompenser ou de punir, qui orientera les intérêts particuliers vers son intérêt, pas si général que cela…

Les révolutionnaires croyaient-ils à l’efficacité de cette démarche ou était-ce une manoeuvre pour ouvrir définitivement la voie à l’économie capitaliste ? Le sujet fait encore l’objet de toutes les spéculations (voir cet excellent article sur la question). Mais au delà des polémiques, qui auront bien du mal à trouver une issue claire tant la Révolution Française fut traversée de courants contradictoires et chaotiques, ce que l’on voit déjà naitre chez les réformateurs de l’époque, c’est une opposition sur la manière de concevoir la méthode qui pourra permettre de faire émerger un intérêt général et améliorer le sort de milliers de travailleurs exploités.

D’un coté, certains considèrent que chaque citoyen est seul, égal devant la Loi, seule forme d’expression valable de l’intérêt général qui ne doit surtout pas être biaisée par d’autres groupements d’intérêts particuliers. Dans ce mode de pensée, toute forme d’association ayant un objectif social est considérée comme un corps intermédiaire s’interposant de manière illégitime entre l’Etat et le citoyen. Mais dans ce cas, si l’on poursuit cette logique, pourquoi l’entreprise industrielle, qui est une forme d’association défendant des intérêts particuliers, trouve-elle grâce aux yeux des gouvernements tandis que les corporations, associations et coopératives demeurent interdites ?

Pour d’autres, l’Etat ne peut, ou ne doit être en lui-même le seul garant de l’intérêt général. Soit parce qu’il est impossible de garantir qu’il soit en mesure d’oeuvrer seul, efficacement à l’intérêt général, soit parce que l’on considère que les travailleurs eux-même sont les mieux placés pour comprendre les problématiques de leur métier et d’envisager les meilleures façons d’y répondre. Ou soit simplement, parce que l’on considère qu’il est naturel à l’homme de se rassembler, d’échanger et de s’unir…

Principes et fonctionnement des coopératives

Evidemment, ces transformations radicales des rapports sociaux ne sont pas passées inaperçues. Elles ont suscité des idées, des initiatives alternatives ainsi que des réactions à la fois idéologiques et concrètes. Sur le plan théorique, Les apports de théoriciens et de praticiens, popularisant les idées de communauté et de démocratie, ont contribué à faire émerger le mouvement de la coopération de production. Parmi les plus célèbres : Saint-Simon, Charles Fourier (fondateur du Phalanstère), Jean-Baptiste Godin (créateur du Familistère), Louis Blanc, Philippe BuchezJoseph Proudhon ou encore Robert Owen, considéré comme l’un des pères de la pensée coopérative.

Seuls devant la Loi, seuls devant l’employeur, seuls face aux marchés, seuls dans des villes nouvelles composées de gens coupés de leurs communautés, le besoin et les bénéfices de l’union de ces nouveaux travailleurs devient criant.

Des initiatives apparaissent de toute part mais sont souvent crées de façon clandestine car toujours interdites par la Loi le Chapelier ou diverses lois instaurant un « délit de coalition » en Europe. Certaines naissent de l’esprit d’entrepreneurs soucieux du bien-être des ouvriers et engendrent des projets comme le Phalanstère ou le Familistère. D’autres émergent à partir des besoins de travailleurs sur le terrain et se répandent rapidement. Le cas le plus fameux est celui des Equitables Pionniers en 1844 en Angleterre. Il s’agit au départ d’un groupement de quelques tisserands qui se rassemblent pour pouvoir acheter, dans un magasin coopératif, des produits bon marché. D’une quarantaine de souscripteurs en 1844, la Société en compte plus de 10 000 en 1880. Les Équitables Pionniers sont imités dans toute l’Angleterre : les coopératives de consommation comptent plus d’un million d’adhérents au début du XXème siècle.

En France, la Bellevilloise est un bon exemple de ce à quoi pouvait ressembler une coopérative parisienne à la fin du XIXème siècle et au début du XXème. Avec jusqu’à 15 000 sociétaires en 1929, elle a été l’une des sociétés les plus représentatives et les plus célèbres du mouvement coopératif français. Autour de la distribution de produits de consommation courante, La Bellevilloise a progressivement développé des oeuvres sociales, éducatives et culturelles étonnamment étendues. Les enfants pouvaient participer à son patronage et bénéficier de séjours en colonies de vacances. Les veuves ou les grévistes y trouvaient le soutien nécessaire pour faire face aux difficultés immédiates. On pouvait y apprendre l’espéranto ou la dactylographie, pratiquer un sport ou chanter, s’initier au théâtre ou assister à un concert donné par de grands interprètes, emprunter des livres à la bibliothèque ou venir danser à l’occasion de nombreuses fêtes, assister à la projection de films et de conférences, consulter un médecin …. La Bellevilloise a largement contribué a recréer du lien et des solidarités dans tout l’est parisien. Bien qu’elle ait aujourd’hui changé d’activité, la Bellevilloise a accueilli l’année dernière la conférence européenne du coworking. Le clin d’oeil historique est assez amusant…

la bellevilloise

En 1895, l’Alliance Coopérative Internationale publie une déclaration sur l’identité coopérative qui énonce sept principes d’une coopérative. Cette définition reste aujourd’hui encore la référence centrale pour les coopératives :

  1. Adhésion volontaire et ouverte à tous. Les coopératives sont des organisations fondées sur le volontariat et ouvertes à toutes les personnes aptes à utiliser leurs services et déterminées à prendre leurs responsabilités en tant que membres, et ce sans discrimination fondée sur le sexe, l’origine sociale, la race, l’allégeance politique ou la religion.
  2. Pouvoir démocratique exercé par les membres. Les coopératives sont des organisations démocratiques dirigées par leurs membres qui participent activement à l’établissement des politiques et à la prise de décisions. Les hommes et les femmes élus comme représentants des membres sont responsables devant eux. Dans les coopératives de premier niveau, les membres ont des droits de vote égaux en vertu de la règle « un membre, une voix » : les coopératives d’autres niveaux sont aussi organisées de manière démocratique.
  3. Participation économique des membres. Les membres contribuent de manière équitable au capital de leurs coopératives et en ont le contrôle. Une partie au moins de ce capital est habituellement la propriété commune de la coopérative. Les membres ne bénéficient habituellement que d’une rémunération limitée du capital souscrit comme condition de leur adhésion. Les membres affectent les excédents à tout ou partie des objectifs suivants : le développement de leur coopérative, éventuellement par la dotation de réserves dont une partie au moins est impartageable, des ristournes aux membres en proportion de leurs transactions avec la coopérative et le soutien d’autres activités approuvées par les membres.
  4. Autonomie et indépendance. Les coopératives sont des organisations autonomes d’entraide, gérées par leurs membres. La conclusion d’accords avec d’autres organisations, y compris des gouvernements, ou la recherche de fonds à partir de sources extérieures, doit se faire dans des conditions qui préservent le pouvoir démocratique des membres et maintiennent l’indépendance de leur coopérative.
  5. Éducation, formation et information. Les coopératives fournissent à leurs membres, leurs dirigeants élus, leurs gestionnaires et leurs employés, l’éducation et la formation requises pour pouvoir contribuer effectivement au développement de leur coopérative. Elles informent le grand public, en particulier les jeunes et les dirigeants d’opinion, sur la nature et les avantages de la coopération.
  6. Coopération entre les coopératives. Pour apporter un meilleur service à leurs membres et renforcer le mouvement coopératif, les coopératives œuvrent ensemble au sein de structures locales, nationales, régionales et internationales.
  7. Engagement envers la communauté. Les coopératives contribuent au développement durable de leur communauté dans le cadre d’orientations approuvées par leurs membres.

Selon l’Alliance Coopérative Internationale, un milliard de personnes sont membres de coopératives dans plus de 90 pays. Un million de coopératives dans le monde emploierait 100 millions de personnes en 2012 ! Les coopératives sont aujourd’hui totalement intégrées dans le système économique et ont largement fait preuve de leur efficacité comme de leur pérennité…

Enseignements pour le coworking

D’abord, il est étonnant de constater la proximité incroyable entre les 7 principes coopératifs et les principes du coworking. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si de nombreux espaces fonctionnent sur le modèle de coopérative (SCOP).

  • Créer du lien dans un environnement individualiste : Les associations de travailleurs et de consommateurs ont émergé dans un contexte de destruction des solidarités collectives avec la volonté explicite de tisser des liens nouveaux. Ces anciennes solidarités rurales et corporatistes pouvaient être jugées trop oppressantes, fermées et mal adaptées aux logiques industrielles, mais leurs désagrégations ont plongé les plus faibles dans un état d’oppression pire encore. Les mouvements coopératifs sont parvenues à enrayer et parfois à faire reculer l’individualisme (dans un contexte souvent hostile), ce qui s’est traduit par une amélioration de la vie de milliers de personnes.

    Notre époque récente souffre elle aussi cruellement de ce manque de liens nécessaires, le coworking peut contribuer à renouer des liens nouveaux entre des indépendants et travailleurs qui actuellement restent trop souvent isolés.

  • L’intérêt général et les intérêts particuliers : Les questions que soulèvent la loi le Chapelier et l’idée de supprimer les « corps intermédiaires » sont centrales pour comprendre l’utilité, et la nécessité de communautés fortes et représentées dans une société. D’une part l’Etat n’est pas une garantie de l’intérêt général et d’autre part, ce n’est pas parce que l’on représente, à titre privé un groupement de personnes ayant des sensibilités et des intérêts communs que l’on ne peut pas oeuvrer à l’intérêt général. Le fait d’être élu ne transforme pas un homme en un serviteur zélé du bien commun, et la vraie valeur de la démocratie ne réside pas dans le fait que chacun puisse élire ses dirigeants mais dans l’existence d’une agora permettant à chaque élément composant une société de s’exprimer de manière pacifique et honnête.

    Une société dans laquelle chacun est seul dans son rapport aux institutions et aux grandes structures abouti à l’instauration de la loi du plus fort et non pas à l’intérêt général.

    Cela me fait dire que les espaces de coworking ont tout intérêt à défendre, non seulement leurs communautés locales, mais également a accentuer leur niveau d’échange et de collaboration entre espaces pour faire réellement émerger les décisions allant dans le sens de l’intérêt général. 

  •  l’échec relatif des initiatives top-down basées sur les communautés d’intérêts

On l’avait vu lors de précédents articles, cela se confirme encore; les initiatives « top-down » tel que le Phalanstère, le Familistère, New Harmony (dans l’Indiana), Ralahine (en Irlande) et Tytherly (en Angleterre) ont toutes connues un succès limité au point de vue opérationnel. Ils n’ont pas souvent réussi à devenir des centres vivants, pérènnes et féconds de production et de justice sociale.

Josiah Warren, un anarchiste qui fut l’un des premiers membres de la New Harmony Society, affirma que la communauté était vouée à sa perte en raison de l’absence de souveraineté individuelle et de propriété privée. Il déclara au sujet de la communauté :
« Les différences en termes d’opinions, de préférences et d’objectifs semblèrent s’accroître proportionnellement à l’exigence de conformité. Deux années furent gaspillées de cette manière ; après quoi, je crois que trois personnes tout au plus avaient encore le moindre espoir de réussite. La plupart des expérimentateurs s’en vinrent, abandonnant tout espoir de réforme, et on sentit le conservatisme se confirmer. Nous avions essayé toutes les formes d’organisation et de gouvernement imaginables. Nous avions un monde en miniature. Nous avions joué la scène de la Révolution française encore et encore avec pour résultat nos cœurs désespérés au lieu des cadavres. Il apparut que c’était la propre loi de la diversité inhérente à la nature qui nous avait vaincus. Nos ‘union d’intérêts’ était en guerre directe avec l’individualité des personnes et des circonstances, et avec l’instinct d’auto-préservation… et à l’évidence, il apparut qu’en proportion de la rencontre de personnes ou d’intérêts, les concessions et les compromis s’avéraient indispensables. »
Ce que dit Josiah Warren mérite une sage médiation pour tous ceux qui créent ou souhaitent créer des communautés d’intérêt sans communautés d’idéaux.

Les communautés d’idéaux sont plus solides car, si les intérêts changent souvent, les idéaux perdurent.

New Harmony

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Après les monastères et les kibboutzim, nous poursuivons notre exploration des lieux de travail qui ont changé l’histoire, une serie d’articles pour tenter de comprendre comment certains espaces de travail et de vie en communauté on pu apparaitre, s’organiser et grandir au point d’infléchir le cours de l’histoire. Aujourd’hui, c’est au tour des ateliers d’artistes de se faire inspecter. Une balade historique qui nous entrainera de louis XIV au Paris bohème des artistes du XIXème siècle.

Pourquoi et comment sont-ils nés ?

Les premiers ateliers d’artistes remontent au moyen-âge. L’art alors est considéré comme sacré, rattaché à Dieu, source de toute création mais dont ses représentants sur terre se permettent parfois d’exercer une censure sévère. L’art et l’artisanat sont largement confondus. L’atelier est le lieu de travail de prédilection pour ces créateurs. Mais l’atelier d’artiste, tel qu’on l’entend aujourd’hui et tel qu’il se déploya à partir du XIXème siècle, est le fruit d’un long et passionnant processus mêlant l’art, l’économie et la politique.

Durant la Renaissance, l’art perd sa dimension uniquement religieuse et devient également un moyen pour les puissants d’illustrer leur grandeur, d’assoir leur autorité et d’attirer à eux non seulement la cour mais également les savoirs-faire et les compétences. On pense aux Médicis en Italie ou à François Ier en France. L’art comme reflet du prestige des puissants atteint probablement son apogée sous le règne de Louis XIV auprès de qui gravitent les meilleurs artistes de son temps; Le Brun, Racine, Lenôtre, LullyMolière, La Fontaine

Mais à cette époque, l’art est produit sur commande. Les artistes choisis par les puissants sont entretenus, honorés, anoblis, bichonnés, ils prennent parfois des libertés mais ne sont pas vraiment libres.

Académies vs Ateliers

En 1648, Louis XIV crée l’Académie Royale de peinture et de sculpture dont il confie la gestion à Le Brun. Elle est l’ancêtre de l’Académie des Beaux-Arts. Elle a pour but de former et d’offrir une reconnaissance, une visibilité aux artistes talentueux.

L’enseignement est prodigué par des maîtres à des élèves triés sur le volet. Les élèves sont ainsi formés à l’étude du nu, aux techniques et à l’esthétique antique etc… Lorsqu’ils ont atteint une certaine maturité, ils peuvent alors choisir leur maitre ou fonder une école. L’académie est un lieu de rencontre et de reconnaissance entre artistes. Chaque année, les artistes de l’académie exposent leur oeuvres au public au cours de salons, moyen privilégié d’accéder à la notoriété et au succès.

Le style académique ne pousse pas tant les artistes à trouver leur propre style qu’à se rapprocher d’un idéal qui repose sur quelques principes; simplicité, grandeur, harmonie et pureté.

Les thèmes de prédilection privilégiés sont l’antiquité greco-romaine et l’orientalisme. Selon du Fresnoy, auteur du premier traité sur la peinture en 1668, « La principale et la plus importante partie de la peinture, est de savoir connaître ce que la Nature a fait de plus beau et de plus convenable à cet art ; et que le choix s’en fasse selon le goût et la manière des Anciens »

L’académie émane du sommet du pouvoir, ce qui en dit assez long sur le caractère solennel, officiel mais également parfois pompeux et figé des enseignements académiques et des productions artistiques de l’époque. Ce modèle restera dominant en France, et dans une grande partie de l’Europe jusqu’à la fin du XVIIIème siècle. En peinture, Gérôme symbolise l’aboutissement et la fin de cette période. Seuls quelques artistes néerlandais comme Rembrandt s’en distinguent vraiment ainsi que d’autres précurseurs comme William Blake, Goya ou Delacroix.

En marge de cet univers académique, une population croissante d’artistes peine à exister. Ceux-ci ne peuvent entrer à l’académie car leur style ne rentre pas dans les principes officiels ou leurs sujets d’étude sont jugés trop communs ou trop provocants.

Ils ne peuvent exposer dans les salons, tenus par les académies. Leurs moyens matériels sont bien souvent limités et doivent partager leur atelier avec d’autres artistes. C’est dans ses ateliers que l’on commence à forger une nouvelle esthétique au service d’une autre vision du monde.

La Révolution Française entraine la disparition des rouages de l’administration royale des arts et de ses académies (remplacée en 1816 par L’académie des beaux-arts). Les aspirations de l’époque changent. Révolutions, réformes politiques et industrialisation placent l’Europe dans une situation inédite. Le romantisme fait son nid dans cette époque mouvementée.

Le romantisme n’est précisément ni dans le choix des sujets ni dans la vérité exacte, mais dans la manière de sentir. Ils l’ont cherché en dehors, et c’est en dedans qu’il était seulement possible de le trouver.

Baudelaire résume en deux lignes le changement qui s’opère au niveau de la conception de l’art. Désormais, l’artiste est celui qui parvient à extérioriser de la manière la plus fine possible son « en dedans ». Dans ce clash entre les académies et les ateliers se confrontent en réalité deux visions du monde et deux façons d’envisager la création.

Pour l’académisme, le point de départ, la source de la création est extérieur et intellectualisé. La Nature fournit le matériaux, le maître enseigne la technique et les procédés pour produire et reproduire d’après Elle.

Ainsi, il est normal de suivre un enseignement hiérarchisé où l’extérieur (le professeur, les préceptes) s’impose à l’élève.

Pour le romantisme et les courants qui vont suivre, le point de départ de la création est intérieur et sensible, la nature ou la société ne sont que des supports pour l’expression de sa sensibilité, ou de ses impressions.

L’artiste devient introspectif. Son travail porte sur la perception. Son environnement de travail n’est pas dans les académies pompeuses et aseptisées mais partout autour de lui, dans ce qui peut nourrir son « en dedans » et lui donner de la substance. L’artiste est en prise avec le monde, et la condition de sa fécondité créative est un environnement capable de toucher son être. Ainsi l’atelier ou la cité d’artiste devient l’environnement idéal. Non hiérarchisé, ouvert, issu de la base, situé au croisement d’influences multiples, il est un terreau adapté à cette nouvelle méthode créative. S’ils ont commencé comme des outils de mutualisation des moyens pour des artistes dans le besoin, ces lieux prennent désormais un sens symbolique et revendicateur, lieu quasi mystique ou se produit la jonction entre l’artiste et son oeuvre. Les ateliers ont tous une sensibilité différente et c’est bien le fait de partager une sensibilité (et non une méthode particulière) qui réunit ces artistes.

Autour du XIXème siècle, l’art se démocratise et de plus en plus d’artistes commencent à pouvoir exister réellement et gagner tant bien que mal -souvent mal- leur vie.  Dans les années 1860, Paris comptait ainsi plusieurs milliers de peintres. Des locaux réservés aux artistes fleurirent à cette époque dans les quartiers neufs comme la Nouvelle Athènes, en complément des logements occupés par les peintres officiels et académiques dans le cœur de la capitale. On voit aussi se multiplier à cette époque des cités d’artistes où se recréent des espaces communautaires, proche de l’esprit de la Bohème.

tassaert

A Barbizon, dans les paysages de la forêt de Fontainebleau, on rompt avec le formalisme de l’époque pour produire des oeuvres inspirées par la contemplation paisible, hédoniste de la nature ou de scènes rurales, loin des représentations glorieuses et intellectualisées des artistes académiques. On travaille en pleine nature et l’on se retrouve le soir à l’Auberge de la mère Ganne pour confronter ses productions dans une ambiance festive.

L’impressionnisme, qui émerge dans la deuxième partie du XIXème siècle, signe l’abandon du style purement figuratif et symboliste propre à l’académisme  pour une approche plus portée vers le suggestif. La couleur, méprisée par les anciens (les académies n’enseignaient pas les techniques de couleur et se focalisaient essentiellement sur le dessin) devient essentielle.

En 1863, le salon de peinture et de sculpture, tenu par les membres de l’Académie, refusa plus de 3 000 œuvres sur les 5 000 envoyées. Face à cette hécatombe, Napoléon III décide qu’une exposition pour les refusés se tiendra au Palais de l’Industrie. C’est le salon des refusés, une première brèche dans la mainmise des académies sur le monde des arts. Manet y présente son déjeuner sur l’herbe qui créera un scandale sans précédent dans les milieux de la peinture. En 1884, le Salon des Artistes Indépendants est créé. Il permet à tous les artistes de présenter leurs oeuvres, sans qu’elles soient soumises à l’appréciation d’un jury. La devise de ce Salon, « Sans jury ni récompenses » symbolise bien l’état d’esprit de cette nouvelle génération.

Comment fonctionnaient-ils ?

Les ateliers partagés, les cités d’artistes, les auberges ou cafés qui servaient d’épicentre aux artistes du XIXème siècle forment un ensemble hétéroclite d’espaces différents régis par des règles souvent informelles. Ils se constituent autour d’artistes influents ouvrant leur espace de travail à d’autres artistes, de propriétaires immobiliers farfelus ou de personnages charismatiques. Malgré cette diversité de fonctionnement, certains points communs reviennent toujours.

  • On se rassemble autour de l’idée, et non de la technique

l’atelier est à la fois lieu d’apprentissage, lieu de production et de distribution. Il devient parfois lieu de promotion. On y croise tous types d’artistes; peintres, sculpteurs, écrivains, poètes … Ces lieux ne s’adressent pas à un profil type ni à une fonction clairement identifiée. Leur élément fédérateur, c’est la communauté de valeur.

  • apprentissage de pair à pair

L’atelier se distingue de l’académie car il est un lieu d’apprentissage de pair à pair.

Chacun est tour à tour élève et professeur, les meilleurs sont reconnus soit sur leur qualité technique, soit pour leur univers créatif particulièrement inspirant ou emblématique de l’esprit de l’atelier.

La technique et le message sont véhiculés ensemble, chaque membre pouvant apporter sa contribution sur ces deux aspects. Personne ne vient se placer en juge pour sanctionner le travail d’autrui. Cela ne veut pas dire que personne ne juge personne mais que celui qui émet un jugement, ne le fait pas depuis une position privilégiée et s’expose lui-même aux regards de ses pairs.

L’apprentissage de pair à pair est enfin le meilleur moyen de bénéficier d’un apprentissage individualisé tout en bénéficiant d’apports exterieurs riches et variés. C’est bien cela qui, dans la nouvelle conception de l’art devient essentiel car le travail y est devenu totalement personnel alors que les ressources (matérielles, techniques et intellectuelles) ont tout intérêt à être partagées. l’atelier permet  la fois l’individualisation de la pratique et la production d’une réflexion collective.

  • Un terreau pour la réflexion collective 

Une idée, une vision n’émerge pas toute formée dès l’origine. A ses débuts, elle est faible et incertaine, ses contours sont mal définis. Elle a besoin d’un environnement favorable, sorte de liquide amniotique qui lui permettra de mûrir pour acquérir son indépendance. Seuls, ces grands artistes du XIXème siècle n’auraient peut-être pas pu produire ce qu’ils ont produit, leurs intuitions, leurs visions n’auraient sans doute jamais pu prendre une forme aboutie. Les ateliers ont servit de couveuses pour ces idées encore diffuses. Le fait de bénéficier de lieux pour construire de nouvelles (micro) sociétés régies par d’autres regles et d’autres idéaux est fondamental pour transformer ses aspirations en réalités.

Et le coworking là-dedans ?

  • L’atelier d’artiste est le meilleur terreau créatif pour l’économie cognitive

Les processus créatifs dans les cercles artistiques sont particulièrement intéressants pour le coworking et l’économie du XXIème siècle car de plus en plus de qualités que l’on prête aux artistes sont désormais sollicitées dans les nouveaux processus créatifs aujourd’hui; créativité, originalité, vision, capacité d’adaptation, capacité d’apprentissage permanent, sens de l’initiative, intelligence cognitive et émotionnelle, intégrité…

Si l’on demande désormais à de plus en plus de travailleurs des qualités que les artistes apprennent à affûter grâce notamment aux ateliers, il est assez logique, que l’environnement de travail idéal tendra à s’approcher de l’environnement traditionnel des artistes.

L’environnement du travailleur de demain ressemblera sans doute plus à l’atelier d’artiste qu’aux bureaux que nous connaissons tous parce que ses exigences de travail ressembleront davantage à celles des artistes du XIXème siècle qu’à celles de l’employé du XXème siècle.

  • Sans jury ni récompense 

« Sans jury ni récompense », la devise du salon des indépendants conviendrait parfaitement au coworking. Le coworking fonctionne également sur ce modèle horizontal, de pair à pair, où personne ne vient se placer en juge pour désigner, choisir et récompenser. Derrière ce mode de fonctionnement on retrouve l’idée que, ce qui relève de la création, de l’innovation, ne peut être compris avec le regard et les moyens existants.

Qui dit juge, dit référentiel de jugement, et donc calquage d’anciennes idées sur de nouvelles. Logique qui tend invariablement à freiner l’innovation réelle.

Cela valide la logique horizontale et bottom-up du coworking et montre comment l’absence du pesant regard du passé sur le présent libère la création.

  • Innovation ouverte

Les ateliers d’artistes furent incontestablement des lieux d’innovations esthétiques et intellectuels et pourtant, ils ne se sont pas organisés comme un labo de recherche où un département de R&D tenu secret. Ils ne furent pas composés de spécialistes en pointe dans un domaine particulier mais brassaient au contraire tout un univers peuplé de gens de tous bords, aux compétences bien différentes.

Les systèmes ouverts, structurés seulement par des idéaux, sont des outils d’innovations, intellectuels, sociaux et artistiques d’une efficacité prodigieuse.

Voici un enseignement intéressant pour le coworking. Pour être vecteur d’innovation, le coworking doit rester ouvert tout en restant capable de rassembler la communauté autour d’idéaux communs. On retrouve d’ailleurs cet élément parmi les exemples que nous avons étudiés auparavant; les monastères et les Kibboutzim.

 

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Les lieux de travail qui ont changé l’histoire. 2/Le Kibboutz http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-2le-kibboutz/#comments Tue, 09 Apr 2013 08:17:07 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=26454 Mutinerie continue ses plongées spatio-temporelles dans les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Après le monastère à l’époque médievale, nous nous attaquons au Kibboutz, ces villages collectivistes émergés en Palestine à partir du début du XXème siècle. Pour cet article, j’ai fait appel à Léonard Déage, un ami non seulement féru d’histoire mais ayant également...

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Mutinerie continue ses plongées spatio-temporelles dans les lieux de travail qui ont changé l’histoire. Après le monastère à l’époque médievale, nous nous attaquons au Kibboutz, ces villages collectivistes émergés en Palestine à partir du début du XXème siècle.

Pour cet article, j’ai fait appel à Léonard Déage, un ami non seulement féru d’histoire mais ayant également testé la vie dans un Kibboutz pendant 6 mois à la fin de ses études. Il sait donc de quoi il en retourne sur ces questions. Rappelons ce qui nous intéresse dans ses flashbacks historiques; comprendre comment des espaces de travail et de vie innovants sont nés, se sont organisés et ont su modifier le cours de l’histoire. Dans ces expériences du passé résident sans doute de nombreux enseignements pour ceux qui tentent actuellement de changer nos façons de vivre et de travailler.

Contexte de la fondation du premier kibboutz : Degania

L’Empire russe de la fin du XIXe siècle connaît de graves troubles politiques, et les émeutiers finissent souvent par se retourner, notamment lors de l’assassinat de l’Empereur Alexandre II, en 1881, contre les très nombreuses communautés juives installées sur les actuels Ukraine, Moldavie, Biélorussie, Pologne et pays baltes.
Parallèlement, les idées sionistes mettent en effervescence les milieux intellectuels laïcs de la Diaspora occidentale : Théodore Herzl publie son Der Judenstaat (L’Etat juif) et réunit le premier Congrès sioniste à Bâle, en 1897.
Ces idées suscitent un enthousiasme particulièrement fort au sein des communautés d’Europe orientale, qui subissent régulièrement de violentes persécutions, et qui restent soumises à des lois discriminatoires.

On assiste alors à plusieurs vagues d’immigration successives vers la Palestine (de l’ordre de 50 000 personnes entre 1881 et 1914), alors sous domination ottomane. De petites  équipes se forment et s’installent sur des terres préalablement acquises par le Fonds National Juif (KKL), et dont l’exploitation leur est concédée.
Pour ces jeunes pionniers, qui le plus souvent ne savent rien de l’agriculture, il s’agit maintenant de survivre, de défricher, drainer les marécages, dépierrer les champs, planter des arbres… Beaucoup se découragent et vont plutôt tenter leur chance en Europe occidentale, aux Etats-Unis ou en Amérique du Sud.

Si la volonté de ces pionniers est bien de créer un Juif nouveau, vivant du travail de la terre et de ses mains (métiers qui avaient longtemps été interdits au Juifs, dans les ghettos d’Europe), loin de toute exploitation de l’homme par l’homme, et si les vétérans du Bund et autres partis socialistes ouvriers juifs sont nombreux, tous ne sont pourtant pas des socialistes convaincus.

En l’absence d’un courant politique dominant et dogmatique, et devant l’extrême diversité de cultures, de langues et de mode de vie des immigrants juifs, de nombreuses expériences d’organisation coexisteront au début. Cela donnera aux Kibboutz une démarche expérimentale indéniable.

La rudesse du travail, dans des champs restés en jachère pendant des siècles, l’isolement géographique, et parfois la nécessité de faire face aux menaces des tribus bédouines environnantes rendent en fait le travail et la vie en communauté indispensables à la réalisation de cet idéal. Les fermes qui ne fonctionnent pas sur des principes égalitaires, avec propriété collective des moyens de production, périclitent ou explosent.

C’est dans ce contexte qu’en 1909 est fondé Degania, au bord du Lac de Tibériade, en Galilée. C’est dans ce kibboutz que de nombreux pionniers seront formés, pour essaimer ensuite en fondant plus loin de nouveaux kibboutzim, dans l’idée de pouvoir revendiquer l’occupation d’un maximum de territoire avant la proclamation prochaine de l’Etat d’Israël et le partage des terres qui s’ensuivrait.

Fonctionnement d’un kibboutz type

Le principe de collectivisme ne s’arrête pas à la propriété et à la coopérativité, mais s’applique aussi à la vie sociale (les repas sont pris en commun dans une grande salle, etc.), à l’éducation (les enfants sont élevés par groupes d’âge, et ne voient leurs parents que quelques heures par jour). Les décisions concernant le kibboutz sont soumises à un régime de démocratie participative directe.

L’administration est réduite au strict minimum, ce qui est rendu possible par le fait qu’en moyenne un kibboutz compte moins de 450 membres, mais pas non plus sans rapport avec un fond de culture anarchiste. Les postes administratifs sont tournants.
Après les dépenses de fonctionnement et les dotations aux investissements, les revenus sont partagés équitablement entre les membres, selon la taille des familles, et les services sont gratuits (école, dispensaire, buanderie, installations sportives, dans une certaine mesure la restauration collective, …). Ces revenus sont d’ailleurs essentiellement versés sous la forme d’un budget (« droit à dépenser dans l’enceinte du kibboutz »), et seulement en partie sous forme de salaire en monnaie courante (pour les achats personnels en dehors du kibboutz).

Cependant, contrairement à ce qu’on pourrait penser, les kibboutzim ne fonctionnent pas en autarcie (ils ne peuvent pas produire tout ce qu’ils consomment), mais ils sont même liés à l’Etat de manière relativement importante. Ils exploitent des terres qui lui sont concédées par l’Etat, et ont touché (jusqu’à l’arrivée du premier gouvernement de droite, en 1977) d’importantes subventions. De plus, les kibboutzim ont historiquement fourni un important contingent à l’administration publique et à l’armée.

Après la proclamation d’indépendance et la première guerre israélo-arabe, en 1948, les kibboutzim contribuent aussi largement à l’absorption du flux d’exilés juifs issus des pays de l’Orient arabe, puis après l’indépendance des pays du Maghreb dans les années 60, puis après l’ouverture partielle de l’Union soviétique dans les années 70, et depuis son effondrement en 90.

Le kibboutz constitue alors une première étape – une sorte de sas de décompression – pour les nouveaux immigrants, au cours de laquelle sont dispensés, dans des écoles dédiées, des cours d’hébreu et des conseils pratiques (formalités, ouverture d’un compte bancaire, enregistrement à la Sécurité Sociale, …).

A noter que, à de rares exceptions près – une vingtaine de kibboutzim religieux sur 271 -, les kibboutzim sont laïques (voire un peu bouffe-rabbin…), et ne retiennent par exemple des fêtes juives traditionnelles que leur origine agricole ou leur sens national.

piocheuses

Héritage

Après une période de crise dans les années 70, certains kibboutzim ont mené de profondes réformes, de l’instauration progressive de salaires différenciés à la privatisation pure et simple, en passant par la constitution en moshav (autre structure, plus proche de la coopérative classique).
En tendance, on a assisté à un recentrage de la vie privée sur la cellule familiale ; c’est ainsi que les enfants sont aujourd’hui majoritairement élevés par leurs parents, que les repas ne sont plus pris systématiquement en commun, et qu’une plus grande partie du budget est versée en monnaie.
De plus, conséquence d’un niveau globalement élevé d’éducation, le kibboutz s’est ouvert sur l’extérieur : en embauchant de la main-d’œuvre non-membre pour les travaux les moins qualifiés, et en permettant aux membres de travailler à l’extérieur (à condition de reverser la plus grande partie de leur salaire à la collectivité).

Aujourd’hui, les kibboutzniks ne représentent plus qu’1,8% de la population israélienne. Pourtant les 271 kibboutzim contribuent à 40% de la production agricole, 10% de la production industrielle et 6% du PIB d’Israël.

Mais surtout le kibboutz a donné au pays une étonnante proportion de ses hauts cadres militaires et politiques, et parmi les personnalités les plus engagées et les plus militantes socialement.
Jusque dans les années 80, il a constitué pour la société israélienne un modèle vers lequel tendre, et s’il ne jouit plus du même prestige qu’autrefois, il a durablement façonné la production, l’idéologie et la culture israéliennes.
Depuis les années 2000, le kibboutz connaît un regain de popularité et sa population croît de nouveau. Certains se sont en effet spécialisés dans des productions à haute valeur ajoutée : haute technologie, agriculture de pointe, industrie de l’armement, … Ils intègrent des bureaux de recherche et développement renommés dans le monde entier. D’autres encore se sont tournés vers les services : le tourisme essentiellement.

Le kibboutz reste une exception historique, et le mouvement communautaire le plus grand du monde.

Et le coworking dans tout ça ?

Quels enseignements le coworking peut-il tirer de l’expérience des kibboutz ?

  • Exodus

Le contexte dans lequel émergent les Kibboutz est unique au monde. La création d’Israël est un exemple rare d’une création nationale essentiellement « bottom-up » ; un mouvement spontané de la base vers le sommet. Elle part d’une base de personnes qui, en dépit d’énormes différences culturelles, partagent un sentiment d’appartenance à une communauté mais ne peuvent espérer vivre selon leur aspirations au sein des pays dans lesquels ils résident.

Le kibboutz est conçu comme un refuge pour les gens persécutés, un moyen d’échapper à l’oppression et à l’exploitation.

Les premiers Kibboutzim emergent bien avant qu’Israël soit reconnu comme un Etat, il ont précédés celui-ci et lui ont permis de prendre forme. Le coworking est également un mouvement bottom-up, né d’abord d’un mouvement spontané et rejoint par une réflexion plus globale. Il comporte également cette dimension de refuge, de lieu de vie et de travail vivant hors des règles actuelles jugées dégradantes, inadaptées, injuste ou simplement obsolètes.

  • Pas de communauté efficace sans idéal

Les Kibboutzim, comme les monastères du reste montrent qu’à partir du moment où des groupes humains sont unis par un idéal commun et une volonté réelle de vivre ensemble, il est possible de construire de grandes choses malgré une diversité culturelle colossale. C’est également quelque chose que le mouvement du coworking doit garder en tête. La diversité de profils et de compétences dans nos espaces ne peut être un véritable atout que si nous sommes capables de proposer et de maintenir un idéal commun partagé par tous.

Le modèle du kibboutz enseigne que lorsque l’on rassemble des gens partageant un idéal et qu’on leur donne les moyens de production, on peut potentiellement refaire société, au point de créer un Etat …

  • L’équilibre entre l’idéal et le réel

Le modèle d’organisation des kibboutzim se dessine au fur et à mesure des différentes expérimentations. Ce qui a émergé c’est fait davantage par pragmatisme que par conviction politique. Ce qui ne veut pas dire que les pionniers n’avaient pas d’idées politiques, mais qu’ils n’avaient pas d’idée préconçue de la forme que celles-ci devaient prendre.

La fondation d’Israël est très rapidement (et violemment) confronté à la dure réalité, et un modèle comme celui du Kibboutz n’aurait pu continuer à exister s’il n’était pas capable de s’y frotter. Il a été façonné par le réel, sans perdre son idéal.

Tandis qu’en pleine Union Soviétique, on transforma l’idéal socialiste en objectifs concrets et en plans quinquennaux, les kibboutz s’employèrent à garder et maintenir cet idéal tout en faisant face au réalités quotidiennes de manière assez pragmatique. J’y vois là un enseignement important sur la manière de conjuguer l’idéal, la vision avec le fameux « mur de la réalité » qui terrifie, et qui bien souvent fini par aplatir bon nombre de nobles esprits …

  •  Les risques

Enfin, on voit aussi dans l’histoire des kibboutzim, les germes des dangers qui peuvent guetter ce modèle d’organisation. L’histoire des Kibboutzim, comme celle des monastères et celle des espaces de coworking comporte ses erreurs, ses tensions et ses divisions.

Pour les kibboutzim, le risque de la confusion entre l’action des communautés et celle des gouvernements est évident.

L’histoire de la fondation d’Israël et celle des kibboutzim ne cesse de s’entremêler au risque de provoquer une perte d’indépendance réelle pour les kibboutzim et une potentielle instrumentalisation de ces derniers au profit d’une politique d’Etat. Les kibboutzim ont clairement servi de verrou pour l’appropriation et la consolidation des territoires fraichement acquis et ont bénéficié d’aides et de subventions diverses.

 On se retrouve bientôt pour découvrir un lieu de travail ayant changé l’histoire; les ateliers d’artiste au XIXème siècle

Si vous souhaitez contacter Léonard, le féliciter, le conspuer ou lui poser des questions, c’est ici

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Vers un exode urbain numérique ? http://www.mutinerie.org/vers-un-exode-urbain-numerique/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=vers-un-exode-urbain-numerique http://www.mutinerie.org/vers-un-exode-urbain-numerique/#comments Tue, 19 Mar 2013 07:58:57 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=26089 La révolution numérique entrainera-elle un exode des urbains vers les campagnes ? Mutinerie se penche sur la question...

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Depuis les années 90, la population rurale est repartie à la hausse en France après plus de 150 ans de baisse continue. La hausse est certes modeste et concerne davantage les périphéries urbaines que les zones véritablement rurales mais elle met fin à un processus présenté comme inéluctable. Plus d’un Francilien sur deux souhaiterait aujourd’hui quitter l’Ile de France ! Et la moitié des candidats au départ se projettent dans une ville petite ou de taille moyenne (moins de 100 000 habitants), devant la campagne (26%) ou la grande ville (18%).

Derrière ce phénomène de retour aux campagnes se cachent des réalités très différentes qui, à mon sens ne permettent pas de conclure à un véritable exode urbain; enchérissement des centres-villes entrainant une fuite vers les périphéries par le mitage des campagnes alentour, fermetures de bassins industriels urbains, augmentation des retraites en zones rurales, fuite des villes pour cause de pollution ou d’insécurité …

L’essentiel du contenu que l’on peut trouver dans les publications suit le même angle d’attaque qui, à mon sens passe à coté de la question de fond. Car il ne suffit pas de constater un mouvement allant des centres vers les périphéries pour conclure à un authentique exode urbain.

La raison principale de l’exode rural fut économique et technologique. Avec la révolution industrielle, les besoins en main d’oeuvre et les revenus chutaient dans l’agriculture alors qu’ils explosaient dans l’industrie. Pour subsister, les populations agricoles sans activité se sont exilées vers les bassins industriels avides de main d’oeuvre.

De la même façon, pour savoir si nous sommes véritablement en train d’assister à un exode urbain, il faut se poser les questions suivantes :

Les zones rurales sont-elles en train de devenir économiquement plus attractives que les villes sur le plan économique ? Quels sont les éléments qui nous permettent de comprendre les causes et les caractéristiques de ce phénomène naissant ?

Evidemment, la vérité est rarement pure et jamais simple. Ce qui suit n’a pas vocation à s’appliquer uniformément partout comme une règle absolue.

Un exode urbain numérique

Dire que les technologies numériques favorisent la mobilité et le travail à distance est presque un lieu commun. Mais il n’en reste pas moins que cet élément est central si l’on veut appréhender l’exode urbain. Plus important, la révolution numérique doit être comprise comme une authentique révolution, non pas comme un simple outil pratique.

La première lecture, c’est que les moyens numériques permettent techniquement de travailler depuis n’importe où. Les technologies actuelles permettent à un travailleur d’accomplir avec un ordinateur et un téléphone, des choses qui nécessitaient, il y’a seulement une quinzaine d’année, un ensemble d’équipements lourds et coûteux. Dans de nombreux métiers, Internet donne à chacun l’accès à un marché de millions d’individus et peu importe que vous viviez à Paris ou au fin fond de l’Ardèche…

Même dans les secteurs non directement liés à l’économie de la connaissance, les moyens de production s’allègent et se décentralisent. On le voit avec des exemples très concrets tels que les imprimantes 3D ou d’autres exemples de productions décentralisées. Mais les moyens numériques permettent un meilleur usage des choses et une meilleure accessibilité des biens d’usage non courant à travers les nouvelles pratiques collaboratives.

La deuxième lecture consiste à voir, au delà des aspects technologiques, ce que le numérique ouvre sur le champ des possibles. Les révolutions néolithiques et industrielles commencent avec des innovations technologiques qui facilitent l’existence. Mais très vite, elles finissent par tout changer, notre rapport à l’espace, aux autres, à nous-même… Elles redéfinissent nos logiciels de pensée.

De la même manière que la révolution industrielle déplace les sources de valeur de l’agriculture vers l’industrie, la révolution numérique déplace la valeur de l’industrie vers la production intellectuelle.

Or, la production intellectuelle (ou cognitive) n’est pas dépendante des infrastructures matérielles complexes que l’on trouve essentiellement dans les villes, elle dépend de la richesse d’un écosystème  qu’il soit urbain, rural ou même virtuel. L’avantage économique des villes, qui était déterminant dans l’ère industrielle, perd ici une partie de sa substance.

Un exode urbain mené par des indépendants

Il n’y aura pas de véritable exode urbain tant que les zones rurales ne pourront être considérés comme de véritables zones d’attraction économiques. Mais, par « zones d’attractions économiques » ne voyons pas là des transpositions des modèles qui firent le succès de l’âge industriel. L’exode urbain ne doit pas être appréhendé avec les idées et les armes d’hier.

la campagne n’a jamais été le terreau adapté au salariat. L’exode rural concernait essentiellement des indépendants (agriculteurs, artisans…) quittant ce mode de travail pour le salariat et il est à parier que l’exode urbain s’inscrira dans le mouvement inverse.

Il existe une corrélation très nette entre le mouvement d’urbanisation de l’occident et celle du nombre de travailleurs indépendants. En 1830 en France, on compte encore 50% d’indépendants dans la population active dans une France encore largement rurale. En 1930, ils ne sont plus que 33%. Après une stabilisation du ratio pour cause de Grande dépression (qui est une essentiellement une crise du capitalisme industriel) et de guerre mondiale, la chute du nombre de travailleurs indépendant reprend de plus belle, encouragée par les Etats occidentaux. En 2007, ils représentent moins 10% de la population active comme le montre cet excellent rapport intitulé « le travailleur indépendant, figure du XXIème siècle » . Le lien entre  industrialisation, exode rural et diminution du nombre d’actifs indépendant est net.

Or le nombre d’indépendants ne cesse d’augmenter dans tous les pays industrialisés. En France, nous sommes passé de 9,6% d’indépendants en 2007 à 11,6 fin 2012. On estime les populations d’indépendants aux Etats-Unis à 35 millions contre 27 millions en Europe.  Cette augmentation numérique rapide, s’accompagne d’une revalorisation nette du travail indépendant par rapport au travail salarié.

L’exode urbain sera principalement mené par des indépendants. Sur le terrain, c’est ce que constate Xavier de Mazenod, fondateur de Zevillage, un site d’information, et un réseau social sur les nouvelles formes de travail. Xavier lui-même a quitté l’Ile de France pour s’installer à Boitron un petit village dans l’Orne. Il est à l’initiative d’un télécentre dans son village.  »Sur 12 travailleurs, on ne compte que 3 salariés dans l’espace. Le modèle du télétravail salarié ne prend pas vraiment dans les campagnes ». Et de fait, l’expérience du télétravail sur le modèle salarié n’est pas récente, elle commence dès le milieu des années 80 et n’a toujours pas réellement donné de résultats incontestables.

Les zones rurales, vastes et peu denses requièrent une forte dose d’autonomie et de polyvalence, éléments assez peu compatibles avec le salariat traditionnel. Elles conviennent bien mieux aux indépendants, capables de gérer leur emploi du temps et leurs déplacements.

Dans l’agriculture, il est impossible de compter le travail en terme de productivité horaire selon des créneaux bien définis. Ce qui compte, c’est être disponible dans les moments importants (récoltes, intempéries, opportunités, incidents…). Cette qualité est également centrale chez les indépendants et les entrepreneurs de l’économie cognitive.

L’indépendant peut travailler au moins une partie de son temps à distance bien plus facilement que le salarié, il n’a pas besoin de s’implanter dans un endroit où la main d’oeuvre est accessible, il est mobile et peut se déplacer avec tout ce qui lui est nécessaire si besoin. Cela le rend mieux à même de profiter réellement du coût plus faible de la vie rural.

Emmanuelle Pometan, fondatrice de l’Agence Nouvelle Culture a quitté Paris  il y’a 6 mois pour s’établir dans la Drôme d’où elle travaille l’essentiel de son temps. Elle remonte à Paris trois fois par mois. « je n’ai perdu aucun client depuis que je me suis installée dans la Drôme, je n’ai raté qu’un seul rendez-vous. D’autre part, l’image de mon entreprise n’a pas souffert auprès des clients, bien au contraire, ils trouvent ça très moderne ».

De l’espace fonctionnel à l’espace comme écosystème

« Les gens qui disent que le travail localisé est mort travaillent dans une industrie définie par un lieu : la Silicon Valley. Ceci veut dire que l’espace compte encore. C’est l’un des facteurs de changement les plus importants. »
Jim Keane, Vice-président de Steelcase

Les modes de vie sont inévitablement liés aux moyens de subsistance. Et ces moyens évoluent, au fil du temps et des avancées technologiques. Historiquement, les peuples ont commencé à se sédentariser à partir de la révolution néolithique. Le passage d’une vie de chasseur-ceuilleur à une vie où le moyen de subsistance, lié au sol, impose de rester sédentaire a totalement bouleversé les rapport sociaux et les modes de vie. La vie sédentaire agricole ayant besoin d’espace, elle appelle à un peuplement extensif réparti sur les vastes territoires, donc à une importante population rurale. La révolution industrielle lie les hommes, non plus à la terre mais à des usines ou à des mines, sur un modèle de développement intensif qui entraine l’apparition de villes à la vocation nouvelle.

Ces villes industrielles ne sont plus considérées comme des zones de friction et d’échange, visions qui prévalaient avant la révolution industrielle, mais comme des méta-infrastructures nécessaires à la production.

C’est la ville fonctionnelle développée par Le Corbusier qui devint le modèle dominant de la reconstruction d’après guerre et dont la conséquence directe fut la séparation des villes en « fonctions »; vie, travail, loisirs et infrastructures de transport. Les grands ensembles de banlieue, les cités dortoirs, les centres d’affaires, les centres commerciaux sont les héritiers de cette vision fonctionnaliste. En fluidifiant les fonctions urbaines et en décomposant les villes, celles-ci sont devenues de véritables broyeuses à externalités positives qui étaient la raison d’être des villes autrefois et qui seront sans aucun doute à nouveau la raison d’être des villes de la révolution numérique dont la productivité dépend de la pollinisation et la captation d’externalités positives. Les villes dominantes de la révolution numérique seront capables de générer des rencontres riches et authentiques, de la sérendipité, du lien social, du sentiment d’appartenance et de la confiance. Si la question des villes à l’heure numérique vous intéresse, j’avais écrit un article sur la , intitulé « cité digitale, cité idéale » …

La révolution numérique, n’abolit pas l’espace, elle le transforme. Elle lui donne un sens et des usages nouveaux.

Et le nouvel usage de l’espace, c’est d’être non plus une infrastructure, mais un écosystème. Un cadre général favorable à telle ou telle activité. Un écosystème se compose d’une multitude de paramètres en interaction permanente. Il suppose du frottement et un croisement des usages

L’exode urbain sera donc vraisemblablement porté par des espaces multifonctionnels. Un exemple déjà concluant en zone rurale est celui des points multiservices permettant par exemple à une boulangerie de proposer des services de retrait d’argent, d’information touristique etc… Cela pérennise l’activité des commerçants locaux, facilité l’accès aux services en zone rurale et permet d’assurer une mission de service public à moindre coût. Exemple d’approche écosystémique réussi.

Xavier de Mazenod souligne l’importance du multiservice en zone rurale « l’idée qu’un lieu égal une fonction ne peut pas marcher en zone rurale » Le télécentre de Boitron accueille des activités très variés; initiations à l’informatique, fêtes ou même élections …

Dans la révolution numérique, l’environnement remplace l’infrastructure et le projet remplace le métier. pour chaque activité peuvent correspondrent différents environnements appropriés.

Dans cette logique, la ville offre un écosystème favorable à certaines activités. On y trouve plus aisément des clients et des partenaires, on y promeut efficacement ses activités, on dispose d’un accès facile à l’information …

La campagne permet une meilleure concentration et une capacité d’exécution accrue. Elle permet une prise de recul et une meilleure capacité de synthèse…

Emmanuelle apprécie l’alternance entre le travail en zones rurales et le travail en zones urbaines. Elle voit cette alternance comme un atout pour sa productivité.

La bonne décision économique pour le travailleur cognitif aujourd’hui n’est-elle pas de pouvoir profiter de cette diversité d’écosystème selon les besoins de son activité ? Ce sera peut-être une question déterminante pour les travailleurs de demain, prêts à évoluer comme des nomades, saisissant dans les différents environnements qu’ils traversent, ce qui est nécéssaire à la réalisation de leurs activités.

Round-Top

Le coworking pourra-il accompagner et encourager ces tendances ?

Le coworking est né de la culture numérique. Il concerne des indépendants mobiles, voire nomades et privilégie une approche par écosystème. Alors vu comme ça, il apparait comme un excellent candidat pour devenir l’un des fers de lance de l’exode urbain.

Et de fait, le coworking se développe en zone rurale et parait très prometteur. Il existe déjà plusieurs initiatives de coworking ruraux comme Arrêt Minute en Aquitaine.

De son coté, l’équipage mutin, toujours assoiffé d’experience, se lance dans l’exploration du coworking en milieu rural. Notre terre d’élection; le Perche. Notre mission; développer un écosystème favorable pour les travailleurs indépendants percherons ou aspirant percherons. Créer une « Percheronne Vallée » dans les vallons harmonieux du Parc Naturel. Nous partons vendredi prochain pour un weekend pour la Loupe dans le Perche. Pour suivre nos aventures Percheronnes sur Facebook, c’est ici. Et pour vous inscrire au Jelly prévu vendredi soir, c’est  !

Le 21 mars au comptoir Général à Paris se déroulera la restitution du Tour de France du Télétravail Mené par Néo-nomade et Zevillage. ce sera l’occasion d’avoir un retour d’experience très riches des initiatives de travail en milieu rural.

 

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Les lieux de travail qui ont changé l’histoire. 1/Le Monastère http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-1le-monastere/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-1le-monastere http://www.mutinerie.org/les-lieux-de-travail-qui-ont-change-lhistoire-1le-monastere/#comments Mon, 25 Feb 2013 09:44:49 +0000 William http://www.mutinerie.org/?p=25741 Quels points communs entre les espaces de coworking et les monastères ? Mutinerie entame aujourd'hui le premier d'une série d'article sur les lieux de travail qui ont changé l'histoire; intrigante plongée mutine en milieu monastique ...

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Avant le coworking, l’histoire a connu d’autres expériences de lieux de vie et de travail partagés qui me font penser de près ou de plus loin à ce que nos communautés expérimentent à travers nos espaces. Ces lieux ont été capables de changer l’histoire durablement et de manière positive. Ils ont contribué à forger à catalyser et à diffuser des valeurs et des idées neuves.

Pourquoi et comment ces lieux se sont créés et ont pu prospérer ? Comment s’organisaient ils ? Quel impact ont ils pu avoir sur les sociétés dans lesquelles ils sont nés ? 

L’histoire ne se répète jamais à l’identique, mais elle peut tout de même nous éclairer sur les dynamiques et l’avenir des expériences contemporaines d’espaces de travail partagés.

J’ai choisi d’étudier plus précisément quatre modèles différents qui feront chacun l’objet d’un billet:

  • Monastères à l’époque féodale
  • Ateliers d’Artistes au XIXème siècle
  • Phalanstère et coopératives ouvrières
  • Kibboutz

Evidement, on pourrait citer plein d’autres exemples de lieux comparables : communautés hippies, monastères bouddhiques, ashrams, villages protestants puritains durant la conquête de l’Ouest américain… Mais les modèles que j’ai choisi me semblent représenter un panel diversifié réunissant pourtant les composantes essentielles qui nous intéressent au niveau du coworking :

  • Communauté délibérément constituée
  • Rassemblée autour de valeurs et d’idéaux communs
  • Capacité productive réelle 
  • Indépendance vis à vis de structures plus importantes
  • Capacité de transformation sociale importante

1) Le Monastère

Et oui, parmi les expériences du passé dont le coworking peut s’inspirer, le monastère tient une belle place. Au moyen-âge, et jusqu’à nos jours, les monastères n’ont jamais été simplement des lieux de prière ou de recueillement. Ils sont aussi des lieux de travail, de réflexion, de partage et de création artistique. A certaines époques, leur poids dans l’économie et dans la société était colossal… Ils ont traversé les siècles en modelant, et parfois en transformant les sociétés au sein desquelles ils sont apparues.

Ils ont rassemblé des hommes autour d’un contrat social spécifique, sur la base de l’adhésion volontaire. Des gens souvent érudits et éclairés, animés par des valeurs fortes et capables de mettre en oeuvre ce qui leur fallait pour vivre conformément à ces valeurs.

Alors voyons voir comment ils s’y sont pris.

Parler des monastères de manière générale serait une tâche trop énorme, car leur histoire s’étend sur plus de quinze siècles et sur presque tous les continents. Je vais donc me focaliser plus spécifiquement sur un moment de l’histoire monastique qui me parait être un concentré significatif : la réforme de Cluny.

Contexte et naissance de la Réforme de Cluny

Au VIIIème siècle, l’ensemble du monde chrétien traverse une crise majeure; fin des premières vagues d’évangélisation, disparition de l’empire Franc qui s’était présenté comme le défenseur de l’héritage chrétien de Rome, division du monde chrétien entre l’Est Byzantin et l’ouest Romain, invasions Arabes et Normandes … Autant vous dire qu’il existe à l’époque, un doute réel sur la capacité de l’église à survivre jusqu’à l’an mil…

Et il ne s’agit là que des difficultés externes. Sur le plan intérieur, les choses ne sont pas plus reluisantes. Les logiques féodales gangrènent ce qui est censé rester à l’abri des vanités temporelles, les évêchés deviennent des biens de famille, ou un rouage du pouvoir, les sacrements s’achètent et se vendent (simonie), les prêtres, qui alors pouvaient se marier, transmettent leur « poste » de père en fils. Quant aux monastères, il est évident que l’exigeante règle de Saint Benoit ne fait plus beaucoup d’émule… Les valeurs pèsent de moins en moins face aux intérêts privés. Les moines sont devenus des vassaux des seigneurs qu’ils doivent accompagner dans leurs campagnes militaires et accueillir avec leur suite, lors de séjours prolongés, paillards et ripailleurs…

C’est dans ce contexte chaotique qu’en 909 en Bourgogne est fondée l’Abbaye de Cluny. La réforme part de deux hommes; un laïc, le duc Guillaume Ier et un religieux, l’Abbé Bernon. Guillaume, très pieux, considère que « La richesse d’un homme est la rançon de son âme. » Il est désireux de pourvoir à son salut en donnant à quelques moines une partie de ses terres et souhaite que la future abbaye soit véritablement un lieu ou l’on y recherche Dieu et qu’il puisse par conséquent être détaché des dépendances féodales. Il s’y prend de manière très fine en se plaçant sous la protection du pape (ce qui à l’époque vous garantissait une vraie indépendance vis à vis des pouvoirs locaux n’osant pas s’en prendre au pouvoir de Rome) mais le pape ne peut lui-même pas véritablement intervenir dans les affaires de l’Abbaye comme le précise ce texte fabuleux de Guillaume Ier :

« Nous avons voulu insérer dans cet acte une clause en vertu de laquelle les moines ici réunis ne seront soumis au joug d’aucune puissance terrestre, pas même la nôtre, ni à celle de nos parents, ni à celle de la majesté royale. Nul prince séculier, aucun comte, aucun évêque, pas même le pontife du siège romain ne pourra s’emparer des biens desdits serviteurs de Dieu, ni en soustraire une partie, ni les diminuer, ni les échanger, ni les donner en bénéfice » 

texte guillaume d'Aquitaine

Ce passage du texte de la fondation de l’abbaye de Cluny est un chef d’oeuvre d’intelligence politique et révèle déjà plusieurs aspects qui firent l’originalité et le succès de l’ordre clunisien, son indépendance, son intégrité et sa compréhension du monde. Le succès de Cluny fut immédiat et l’ordre a très vite su faire des petits. Les monastères environnants se rattachèrent rapidement à Cluny, les dons affluèrent et furent très intelligemment investis. L’autorité morale des moines de Cluny et leur fécondité intellectuelle trouvèrent une audience large parmi les populations fatiguées de la corruption du message de l’église.

Les successeurs de Bernon sont choisis pour leur compétence, leur mérite et leur valeur, non pas sur leurs quartiers de noblesse ou leur appétit de pouvoir. Ils se sont avérés excellents et complémentaires. Bons gestionnaires, fins diplomates, hommes d’arts et de lettres, ils contribuent à l’essor moral et matériel de leurs communautés. Odon succède à Bernon en 927, c’est un musicien talentueux qui améliore la beauté des chants et des liturgies. Avec « la Vie de saint Géraud d’Aurillac« , il propose le premier modèle du chevalier chrétien, celui d’un puissant seigneur qui met sa force et ses richesses au service de la justice et de la paix. Il veille à pourvoir l’abbaye d’une bonne bibliothèque, d’une école et obtient le droit de battre monnaie. Mayeul intervient jusque dans des querelles privées de la famille impériale, ce qui lui valut de se voir proposer le siège pontifical après la mort de Benoît VI ou Benoît VII, siège qu’il refusa, se jugeant plus utile au milieu de ses moines. La liste est longue et passionante…

L’esprit de la Réforme

Indépendance :

Le coup de génie de Guillaume Ier qui signe la naissance de Cluny place l’abbaye sous la protection du pape mais non sous sa dépendance. Cluny dispose d’une marge de manoeuvre totalement inédite pour l’époque et l’ordre saura en profiter joyeusement (prenant même de plus en plus de liberté au fil du temps, jusqu’à battre leur propre monnaie!). Bermon réhabilite la règle de Saint Benoit, qui précise que les monastères doivent pouvoir être autonomes financièrement et doivent pouvoir s’autogérer. « Le monastère doit, autant que possible, être disposé de telle sorte que l’on y trouve tout le nécessaire : de l’eau, un moulin, un jardin et des ateliers pour qu’on puisse pratiquer les divers métiers à l’intérieur de la clôture. »

Le travail des moines est la première condition de l’indépendance du monastère et est considéré par Saint Benoit comme indissociable de l’épanouissement des âmes :

« L’oisiveté est ennemie de l’âme. Les frères doivent donc consacrer certaines heures au travail des mains et d’autres à la lecture des choses divines. Ils sont vraiment moines lorsqu’ils vivent du travail de leurs mains comme nos pères et les apôtres. « 

L’indépendance de Cluny existe donc sur tous les plans; politique, grâce au statut exceptionnel que l’ordre a su s’aménager. Economique grâce au travail des moines, et aux moyens importants dont ils disposent. Spirituelle grâce à leur autorité morale et leur ouverture d’esprit. A bien des égards, Cluny ouvre une brèche majeure dans le système féodal de l’époque reposant sur un enchevêtrement d’allégeances et d’intérêts croisés.

Intégrité

La mission que se donnent les moines de Cluny est l’élévation des âmes à travers la recherche de Dieu. Et ils s’y attachèrent avec une ardeur et une constance réelle sous la conduite d’abbés s’appliquant à être exemplaires dans leur tâche.

Qu’elle nous paraisse un brin archaïque aujourd’hui, la règle bénédictine fut parfaitement remise en honneur. L’observance des anciens voeux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance fut rigoureusement exigée des moines dont la vie était réglée selon un horaire quotidien. Pour autant, les moines Clunisiens n’érigent pas un mur entre le monde spirituel et le monde matériel. Ils ne vivent pas un ascétisme dur et intransigeant. La musique, la poesie, l’architecture, le travail de la terre comme la prière sont autant de moyens d’accéder à Dieu. 

Ouverture

La spiritualité de Cluny ne s’inscrit pas dans une opposition entre l’esprit et la matière, entre Dieu et le monde mais considère le monde comme un terrain de recherche pour l’esprit.

La musique, l’art, l’architecture, le travail, la charité, la politique sont autant de moyens possibles et complémentaires d’élever son âme et d’approcher Dieu pourvu qu’ils ne détournent pas les moines de leur recherche spirituelle. C’est pourquoi les abbayes clunisiennes sont des lieux ouverts et en interaction permanente avec la société; les paysans et artisans qui travaillent avec l’abbaye, les moines venus de toute l’Europe, les seigneurs qui demandent conseil ou audience, les nécessiteux à qui l’ordre distribue nourriture, vêtements et chaussures etc… Elles sont également des lieux ouverts à des influences exterieures, musicales, architecturales et même aux influences d’autres religions. Pierre le Vénérable, qui fut père Abbé à Cluny fait traduire le Coran et invite ses moines à le lire…

Le cocktail d’indépendance réelle, d’intégrité et d’ouverture est généralement très gagnant, et d’une grande fécondité; l’indépendance donne les moyens d’agir, l’intégrité indique le cap à tenir et l’ouverture permet d’ajuster les voiles selon les possibilités…

abbaye de cluny

Héritage

À la fin du XIe siècle, Cluny exerce son autorité sur 1450 maisons, dont 815 en France, 109 en Allemagne, 23 en Espagne, 52 en Italie, 43 en Grande-Bretagne. Difficile de raisonner en PIB à cette époque mais il est évident que l’ordre de Cluny pesait très lourd dans l’économie européenne médiévale… Sans compter les savoirs-faire uniques et les technologies qu’ont apporté les moines au fil du temps ni l’activité d’archivage, de conservation et de diffusions de textes antiques par les moines dont l’appropriation par les humanistes quelques siècles plus tard a permis à l’Europe de s’extraire de l’époque féodale.

Parmi les héritages culturels majeurs de Cluny, on peut citer leur apport à l’embellissement des messes et des liturgies par des chants plus riches et des cérémonies plus soignées, une contribution importante à l’architecture par un travail colossal de construction et de rénovation.

Cluny invente également la pensée chevaleresque et mène un vrai travail visant à « dégrossir » une aristocratie aux moeurs guerriers et paillards. Elle donne ainsi aux autorités féodales un sentiment de devoir envers le reste de la société.

Autre apport intéressant dont Cluny n’est pas l’inventeur mais incontestablement un promoteur est une nouvelle conception du travail hérité de Saint Benoit. Jusqu’alors, le travail est avant tout considéré comme une activité avilissante, indigne des penseurs, des religieux ou des dirigeants (c’est l’héritage de la conception antique du travail). Mais Cluny, en mettant en avant la pensée de Saint Benoit, parvient à modifier ce paradigme, à faire du travail manuel une activité indispensable pour « nourrir » son esprit. C’est le fameux « Ora et Labora » bénédictin.

Ironiquement, le modèle Clunisien finira par s’effriter sous ses propres pesanteurs. Devenu tellement énorme et tellement intégré dans le monde, il suscitera de nouvelles réformes (la réforme Cistercienne principalement) et finira par se fondre dans les idées de son temps. Il meurt donc de sa belle mort étant parvenu à généraliser ses idées en suscitant de nouveaux élans spirituels.

Et le coworking dans tout ça ?

Pourquoi prendre autant de temps à discuter d’une réforme monastique datant de plus d’un millénaire ? Tout simplement parque j‘y vois plusieurs enseignements majeurs pour les acteurs du coworking :

  • D’abord, il est amusant de souligner le parallèle entre les conditions de naissance de Cluny et celle du coworking. Les parallèles historiques sont toujours un peu casse-gueule mais, que l’on observe le fonctionnement du clergé en l’an 900 ou celui des grandes entreprises actuelles, on voit dans les deux cas un modèle essoufflé, manquant de marge de manoeuvre, de lucidité et d’adéquation avec les aspirations de son époque. 
  • Cluny ou le coworking sont proches dans leur méthodes et dans les moyens employés pour créer une alternative; ne pas chercher l’effet de « masse critique », ou les alliances prématurée avec des institutions trop importantes. Ne pas non plus s’opposer brutalement au modèle dominant mais simplement suivre sa propre voie sereinement avec ardeur et intégrité. Ne pas vouloir vendre un modèle avant de l’avoir testé et éprouvé mais être capable de démontrer par l’exemple le succès de ce que l’on a créé et de communiquer l’envie de changer de modèle.
  • Cluny montre que le combo Indépendance, Intégrité, Ouverture est un trio fécond, capable de faire bouger les lignes. C’est aussi je pense, une ligne que nous devons tenir en temps que mouvement émergent. Cluny montre que ça vaut le coup de travailler dur pour se garantir une indépendance financière, politique et intellectuelle. De rester droit dans ses valeurs sans ceder aux compromissions et de rester ouverts et d’échanger en permanence avec tous les acteurs de la société sans être ni doctrinaire, ni moralisateur.
  • Enfin, j’y vois un vrai encouragement pour le mouvement du coworking, car Cluny montre qu’en commençant petit, mais dans de bonnes conditions, on peut rapidement parvenir à diffuser largement dans la société et transmettre le meilleur de ce que l’on a à transmettre. 

On se retrouve au prochain épisode pour continuer à explorer d’autres types d’espaces de travail ayant changé l’histoire …

 

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